Mmoires du vice-amiral baron Grivel : Rvolution-Empire - Les ...

868 MÉMOIRES 1» I VICE-AMIRAL BAROX GRIVEL
dans (ont autre pays. Qu'une nouvelle, comme celle qui venait
de nous assaillir, lasse éclater les sentiments, jusque-là com-
primés, (Inné population qui vit (In commerce et qui voit la
paii au Itontde nos revers, cela se conçoit à la rigueur; mais
que, uon contente de se réjouir publiquement de l'humiliation
de nos armes, cette population souffre que des misérables inau-
gurent, par le massacre de quelques pauvres Egyptiens, dès
longtemps établis chez elle, la reprise de la cocarde blanche,
c'est inimaginable pour qui ue connaît pas la fougue méri-
dionale.
Nous contînmes heureusement ces mauvaises dispositions,
tant que nous fumes présents, et la justice veut que j'ajoute
que nous fûmes aidés dans cette bonne œuvre par la modéra-
tion des chefs de la garde nationale. J'ignore comment les
choses allèrent par la suite, et comment cette même garde
nationale ne réussit pas, plus tard, à contenir les assassins;
mais je suis sûr que ses chefs déplorèrent, avec la généralité
des Marseillais, ces excès coupables et qu'ils en rougirent pour
leur ville.
Je parcourus dans la journée le quartier Saint-Jean et eus la
satisfaction de le trouver plus paisible que je ne le supposais.
Je fus l'objet de quelques quolibets, en passant, mais ils
n'avaient aucun caractère d'hostilité directe. « C'est encore un
castagne, » disaient les commères, ce qui signifiait un bona-
partiste, parce que les châtaignes qu'on mange à Marseille
viennent de Corse. A part ces mots ironiques, on aurait pu se
croire en paix. Dieu sait cependant combien on eût été loin de
la vérité! Il était évident, à quatre heures, que, si l'évacuation
de la ville était renvoyée au lendemain, la nuit ne se passerait
pas sans combat et que, la guerre civile une fois commencée,
les plus grands malheurs pouvaient s'ensuivre C'est ce qui
décida le général Verdier à se porter sur Toulon, dès le soir
même.
J'avais de bonne heure averti l'amiral Duperré par une ssta
j