Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
intuitivement que, si cet état se prolongeait au delà d'une certaine limite,<br />
l'âme s'exilerait pour toujours du corps, enlevée sur le flot enchanteur de ces<br />
harmonies de paradis. Cette musique ne peut même pas être comparée à celle<br />
de ce monde, bien que, dans son ensemble, sa tonalité se rapproche de celles<br />
du violoncelle et de l'orgue. Les airs sont toujours élevés, nobles,<br />
majestueux, au delà de tout ce qu'on peut dire et ont quelque analogie avec<br />
la musique sacrée. Ils ne sont jamais gais, et encore moins vulgaires ;<br />
seulement, quelquefois, par la richesse et le volume des sons, ils rappellent<br />
un peu certaines scènes du grand opéra. Aussitôt que l'orchestre<br />
transcendantal a préludé par une série d'accords, un chœur de voix<br />
merveilleuses, aussi bien masculines que féminines, entre en jeu. Parfois, des<br />
solos se font entendre ; d'autres fois, ce sont des duos, ou des répliques<br />
chorales, de voix d'hommes et de voix de femmes. En certains cas, c'est<br />
une voix de ténor, très douce, qui entraîne et émeut. Le percipient s'exprime<br />
ainsi à ce sujet : « Je n'en<br />
Page 214<br />
ai jamais entendu de pareille ; je n'en concevais même pas la<br />
possibilité. C'est une voix que je reconnaîtrais entre mille. »<br />
Cette musique, quoique subjective, lui parvient d'une manière<br />
soudaine et inattendue, comme cela se produirait pour la musique<br />
terrestre. D'ordinaire, elle n'a qu'une durée très courte ; une fois qu'elle<br />
s'était prolongée plus que d'habitude, le percipient s'est presque senti<br />
mourir, parce qu'elle engendre un état d'extase insoutenable pour une<br />
fibre mortelle. Il se leva, se promena, monta l'escalier, sortit de chez lui,<br />
en s'efforçant de différentes manières de se libérer de la fascination<br />
extatique ; mais la musique l'a suivi partout, de temps à autre, durant la<br />
journée entière. Il s'exprime ainsi : « L'air paraissait saturé de musique,<br />
qui surmontait tous les autres bruits, en envahissant l'espace infini ; il<br />
me semblait incroyable que les autres ne la perçussent point ».<br />
Lorsqu'il lui arrive de percevoir de la musique transcendantale, son<br />
visage s'illumine et semble glorifié ; le monde n'existe plus pour lui. A<br />
ce moment-là, il n'est plus qu'un faisceau de nerfs sensitifs, dans lequel<br />
se réfléchissent les harmonies qui ont jailli du « Grand Artiste de<br />
l'Univers », et qui palpitent éternellement dans les espaces intersidéraux.<br />
La plupart d'entre nous, pauvres créatures dominées par les sens<br />
terrestres, ne sont à même de, saisir que les dissonances des accords<br />
fragmentaires qui parviennent jusqu'à nous, alors que lui, il palpite à<br />
l'unisson avec le rythme de l'Univers. Tout d'abord, mon ami pensait<br />
être victime d'une sorte d'autohypnotisation ; mais peu à peu, et pour