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Groupes de jeunes et pratiques de prévention spécialisée

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epérer si le groupe perm<strong>et</strong> au jeune <strong>de</strong> s’épanouir ou si, au contraire, il constitue un frein à sasocialisation, notamment lorsqu’il représente un <strong>de</strong>s seuls espaces <strong>de</strong> vie en collectif qui ne peutsuffire à une construction i<strong>de</strong>ntitaire positive. La présence dans le groupe répond à un besoin <strong>de</strong>combler son temps libre. Mais les professionnels rencontrés nous ont expliqué que plus le jeunepasse <strong>de</strong> temps dans un groupe, plus ils sont vigilants à son égard. En eff<strong>et</strong>, parfois, le jeune peutpasser toutes ses journées à « tenir les murs », selon une expression maintes fois utilisée dans lesentr<strong>et</strong>iens, ce qui traduit souvent un vi<strong>de</strong> occupationnel qui illustre une forte désocialisation dujeune : déscolarisation, absence <strong>de</strong> proj<strong>et</strong> professionnel, rupture <strong>de</strong>s liens familiaux… Au contraire,un jeune peut fréquenter une « ban<strong>de</strong> <strong>de</strong> potes » lors <strong>de</strong> son temps libre, souvent en fin <strong>de</strong> journée,<strong>et</strong> être par ailleurs intégré à d’autres collectifs constitués (activités sportive, professionnelle,scolaire…). Dans ce cas, le groupe peut bien remplir son rôle <strong>de</strong> socialisation, à l’écart <strong>de</strong>s adultes <strong>et</strong>entre <strong>jeunes</strong> d’une même tranche d’âge.De la même façon, les professionnels <strong>de</strong> la prévention spécialisée repèrent lorsque <strong>de</strong>s très <strong>jeunes</strong>(moins <strong>de</strong> 12 ans) ou <strong>de</strong>s «plus vieux » (plus <strong>de</strong> 20 ans) fréquentent assidûment <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong><strong>jeunes</strong> : ce sont <strong>de</strong>s éléments qui m<strong>et</strong>tent les équipes éducatives en alerte. Soit l’adolescent est tropjeune pour occuper l’espace public en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s heures dites « normales », c’est-à-dire en soirée, cequi peut laisser paraître un désengagement <strong>de</strong>s parents dans l’éducation du jeune, ou en journée lasemaine, ce qui dans ce cas signifie que le jeune est en décrochage scolaire. Ensuite, les <strong>jeunes</strong> ayantdépassé la vingtaine <strong>et</strong> qui « tiennent encore les murs » sont souvent en forte désocialisation, surtouts’ils sont présents la journée, ce qui illustre en général un faible engagement dans une démarched’insertion scolaire ou professionnelle.Le collectif : un moyen <strong>de</strong> r<strong>et</strong>rouver une estime <strong>de</strong> soiComme nous l’exposions ci-<strong>de</strong>ssus, le passage par le groupe perm<strong>et</strong> d’acquérir une consciencesociale <strong>et</strong> ce notamment pour les <strong>jeunes</strong> les plus en difficulté, qui ne sont pas ou peu inscrits dans lescadres formels, <strong>et</strong> notamment l’école. Comme le souligne Marwan Mohammed 132 , on observe unecertaine homogénéité dans les parcours <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> fréquentant les ban<strong>de</strong>s : « Dans les groupes <strong>de</strong>16-18 ans, on voit clairement une similitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s expériences scolaires qui fait lien. Dans les quartiersoù je travaille, ces <strong>jeunes</strong> ont eu <strong>de</strong> lourds décrochages scolaires. » Ces expériences négatives avecune institution à forte portée symbolique participent à la création d’un rapport conflictuel àl’environnement. Dans ce contexte, le groupe ou la ban<strong>de</strong> va offrir aux <strong>jeunes</strong> un cadre normatif plusattirant : un espace <strong>de</strong> reconnaissance sociale. C<strong>et</strong>te référence alternative à la culture <strong>de</strong> la rue peutperm<strong>et</strong>tre aux <strong>jeunes</strong> <strong>de</strong> r<strong>et</strong>rouver une estime <strong>de</strong> soi, un moyen <strong>de</strong> revalorisation à court terme,d’autant plus important pour les <strong>jeunes</strong> d’origine immigrée qui ont souvent vécu <strong>de</strong>s expériences <strong>de</strong>discrimination <strong>et</strong> voient la société globalement raciste <strong>et</strong> donc comme un ennemi. La constructioni<strong>de</strong>ntitaire, dans ce cas, se fon<strong>de</strong> sur l’opposition du « nous » aux autres, « eux », qui n’acceptent pas« nos » normes <strong>et</strong> « nos » co<strong>de</strong>s. Michel Lemay 133 a d’ailleurs constaté que chez les enfants ayant étéprivés d’une cellule familiale forte <strong>et</strong> constructive, l’appartenance à un groupe <strong>de</strong> pairs apparaît plustôt : il <strong>de</strong>vient le moyen <strong>de</strong> pallier les carences <strong>de</strong>s autres groupes (familiaux, scolaires…) <strong>et</strong> <strong>de</strong> se132 Raynal, juill<strong>et</strong> 2006133 Lemay, 1975<strong>Groupes</strong> <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong> <strong>et</strong> <strong>pratiques</strong> <strong>de</strong> prévention spécialisée – CTPS 2010 - Page 145

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