On voit donc que le groupe protège ses membres s’il acquiert une réputation, <strong>et</strong> ce par plusieursbiais : la violence <strong>et</strong> les bagarres, les joutes verbales <strong>et</strong> plus globalement sa capacité à avoir unascendant sur les autres groupes ou individus présents sur un même territoire.2 - La constitution <strong>de</strong>s groupesSouvent le groupe dans l’espace public se constitue « par défaut », parce que les <strong>jeunes</strong> ne peuventpas se r<strong>et</strong>rouver chez les uns ou les autres <strong>et</strong> ce pour diverses raisons : appartement trop p<strong>et</strong>it,famille qui n’autorise pas, manque <strong>de</strong> place <strong>et</strong> d’espace à soi dans le logement parental ou, toutsimplement, vouloir se r<strong>et</strong>rouver entre <strong>jeunes</strong>, sans la présence d’adultes. Les <strong>jeunes</strong> sont donc<strong>de</strong>hors car ils ne peuvent pas être <strong>de</strong>dans <strong>et</strong> qu’ils désirent se rassembler. Ils se r<strong>et</strong>rouvent dans larue car souvent, ils ne vont dans un lieu collectif que s’il y a un intérêt à y aller. On notera sur cepoint que les groupes <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong> rencontrés par les équipes <strong>de</strong> prévention spécialisée ne sont pas, engénéral, ceux qui sont inscrits dans <strong>de</strong>s structures d’animation.Pour autant, les groupes ne se constituent pas au hasard. A travers les entr<strong>et</strong>iens menés auprès <strong>de</strong>séquipes <strong>de</strong> prévention spécialisée, on a en eff<strong>et</strong> pu distinguer trois motivations à être ensemble, à labase <strong>de</strong> la constitution du groupe. Ces trois éléments ne sont pas exclusifs <strong>et</strong>, la plupart du tempsmême, se cumulent entre eux. En eff<strong>et</strong>, comme nous l’avons expliqué en introduction, le groupe estsouvent empreint d’une histoire qui prend ses marques dans une temporalité plus ou moins longue :souvent, les <strong>jeunes</strong> ne sont pas ensemble pour une seule <strong>et</strong> même raison, mais pour plusieursfacteurs qui peuvent varier selon les jours, les lieux voire les membres qui composent le groupe.Le partage d’une histoire commune : les groupes <strong>de</strong> pairs, groupes <strong>de</strong> potesD’abord, pour les <strong>jeunes</strong>, le critère qui prime semble être le partage d’une histoire commune par lesmembres du groupe. Ces groupes sont ceux plus couramment appelés les groupes <strong>de</strong> pairs, ceux queles éducateurs nomment également le « groupe <strong>de</strong> potes ». Plusieurs bases affinitaires peuventexpliquer l’existence <strong>de</strong> ces groupes. Cela peut être <strong>de</strong>s liens familiaux (fratries, cousins…),professionnels (même entreprise pour les plus âgés), <strong>de</strong> voisinage (un même quartier <strong>et</strong> davantage,un même immeuble, voire une même montée d’escalier) ou scolaires (même collège, même lycée).Ces groupes sont les plus répandus dans l’espace public. C<strong>et</strong>te dénomination se r<strong>et</strong>rouve dans <strong>de</strong>nombreux écrits <strong>de</strong> sociologues. Pour exemple, David Lepoutre en donne une définitionintéressante : « la sociabilité adolescente <strong>de</strong> la culture <strong>de</strong>s rues s’épanouit dans le cadre <strong>de</strong> groupesinformels, sans hiérarchie ritualisée ni dénomination particulière, forme d’agrégation juvénile que l’onr<strong>et</strong>rouve dans <strong>de</strong> nombreuses sociétés <strong>et</strong> que l’on appellera ici les "groupes <strong>de</strong> pairs". Les groupe <strong>de</strong>pairs, c’est simplement la "ban<strong>de</strong> <strong>de</strong> copains" qui ont l’habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> traîner ensemble, qui ont tissé <strong>de</strong>sliens au fil du temps, en bas <strong>de</strong>s cages d’escalier, dans les rues <strong>de</strong> la cité, dans les classes d’école, surles terrains <strong>de</strong> foot, dans les salles <strong>de</strong> sport, en colonie <strong>de</strong> loisirs… » 137Plus globalement, une forte segmentation <strong>de</strong> l’espace explique souvent la constitution <strong>de</strong> ces137 Lepoutre, 2001, page 129<strong>Groupes</strong> <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong> <strong>et</strong> <strong>pratiques</strong> <strong>de</strong> prévention spécialisée – CTPS 2010 - Page 147
groupes affinitaires. Les <strong>jeunes</strong> sont peu mobiles, <strong>et</strong> ce autant sur les territoires ruraux ou semirurauxau sein <strong>de</strong>squels il est impossible <strong>de</strong> se déplacer sans moyen <strong>de</strong> locomotion, qu’au sein <strong>de</strong>squartiers <strong>de</strong> grands ensembles ou <strong>de</strong> centre ville où les <strong>jeunes</strong> sont finalement assez statiques <strong>et</strong>attachés à un espace assez restreint qui symboliquement ne dépasse pas les limites du quartier.« L’ancrage local est ici très marqué, le quartier faisant figure <strong>de</strong> support d’i<strong>de</strong>ntité essentiel. (…) Lecadre <strong>de</strong> référence principal reste cependant celui du grand ensemble. » 138 Les <strong>jeunes</strong> partageant unmême espace au même moment sont donc amenés à se regrouper. Les liens d’affinités repérés sontdonc le plus souvent <strong>de</strong>s liens <strong>de</strong> voisinage, s’additionnant souvent au partage d’un mêmeétablissement scolaire. Pour les <strong>jeunes</strong> <strong>de</strong>s quartiers d’habitat social, les liens <strong>de</strong> voisinage secumulent souvent avec le partage <strong>de</strong> l’histoire commune <strong>de</strong> la galère, du même imaginaire car cesespaces concentrent <strong>de</strong>s personnes partageant les mêmes difficultés (psychologues du CODASE).Tous ces facteurs expliquent généralement la constitution <strong>de</strong>s groupes par tranche d’âge, <strong>et</strong>indirectement par <strong>et</strong>hnie d’origine. « Les affinités <strong>et</strong>hniques jouent parfois (…) mais ne conditionnentpas <strong>de</strong> façon définitive le recrutement <strong>de</strong>s groupes. L’âge <strong>et</strong> les affinités <strong>de</strong> personnes sont plussouvent déterminants » 139 . En eff<strong>et</strong>, les populations immigrées sont majoritairement présentes ausein <strong>de</strong>s quartiers d’habitat social qui eux mêmes sont souvent segmentés sur une base <strong>et</strong>hnique :ainsi les <strong>jeunes</strong> d’une même origine <strong>et</strong>hnique se regroupent ensemble, non pas par choixcommunautariste mais parce qu’ils habitent à proximité <strong>et</strong>/ou fréquentent le même établissementscolaire. Toutefois, on notera l’exception du quartier du Neuhof au sein duquel les clivages <strong>et</strong>hniquessont forts, peut être en raison du fait que le quartier est composé <strong>de</strong> sous-quartiers avec <strong>de</strong> fortesdominantes <strong>et</strong>hniques (une « mosaïque <strong>de</strong> quartiers » selon les éducateurs rencontrés). Pour cequartier, un fait marquant mérite d’être signifié : l’entre-soi <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> d’origine tsigane qui, outre unfonctionnement communautaire fort, est renforcé par le fait qu’ils habitent à proximité directe lesuns <strong>de</strong>s autres.D’une façon plus générale sur l’ensemble <strong>de</strong>s sites investigués, on r<strong>et</strong>rouve, au sein d’un mêmegroupe, <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> qui ont partagé le même collège, voire la même classe, puisque ce lieu est biensouvent à la base <strong>de</strong>s constructions affinitaires à l’adolescence. Souvent, ces <strong>jeunes</strong> partagentégalement <strong>de</strong> mêmes lieux d’habitation, sauf en ce qui concerne l’équipe du Pays Voironnais puisqueles collèges couvrent <strong>de</strong>s espaces particulièrement étendus. Du coup, sur ce territoire, on notera queles affinités peuvent au sein du collège se construire en fonction <strong>de</strong> la répartition <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> dans lesclasses <strong>et</strong> les établissements, <strong>et</strong> pas forcément selon le lieu d’habitation.La pratique d’une activité parallèle : les groupes <strong>de</strong> traficOn r<strong>et</strong>rouve un second critère pouvant expliquer l’existence d’un groupe <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong>, celui <strong>de</strong> lapratique d’une activité parallèle. Ainsi, s’il semble important <strong>de</strong> rappeler que cela ne constitue pas lecritère principal, nous avons tout <strong>de</strong> même pu i<strong>de</strong>ntifier sur l’ensemble <strong>de</strong>s sites d’enquêtel’existence <strong>de</strong> groupes autour <strong>de</strong> ce type d’activité (trafic d’obj<strong>et</strong>s volés, <strong>de</strong> cannabis, <strong>de</strong> droguedure…). En général, les membres sont déjà connus <strong>de</strong>s professionnels intervenant auprès <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong>en difficulté.138 Lepoutre, 2001, page 129139 Lepoutre, 2001, page 129<strong>Groupes</strong> <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong> <strong>et</strong> <strong>pratiques</strong> <strong>de</strong> prévention spécialisée – CTPS 2010 - Page 148
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