plusieurs membres du groupe. Vraisemblablement, la lour<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>s parcours individuels, l’existenceen interne <strong>de</strong> relations conflictuelles <strong>et</strong> violentes, <strong>et</strong> le contexte d’urgence issu <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong>justice <strong>et</strong> d’incarcération qui menaçaient les <strong>jeunes</strong> ont déterminé un mo<strong>de</strong> d’intervention plusindividuel que collectif. La préférence pour l’individuel n’a pas totalement effacé cependant leregistre du collectif puisque certains <strong>jeunes</strong> ont participé à <strong>de</strong>s chantiers qui se font en équipe. Maison peut penser, cependant, que le contexte d’urgence <strong>et</strong> le profil à haut risque <strong>de</strong> ce type <strong>de</strong>regroupement rendaient peu probable un adossement sur le collectif pour développer un proj<strong>et</strong>éducatif commun.Certaines actions illustrent une autre orientation qui consiste à entr<strong>et</strong>enir la logique collective <strong>et</strong> àfaire reposer l’action sur le groupe naturel en valorisant ses potentialités. Le pays voironnais offre unexemple <strong>de</strong> ce type <strong>de</strong> démarche où le groupe <strong>de</strong> départ porte collectivement un proj<strong>et</strong> d’activité quise construit avec le soutien <strong>de</strong> la Prévention spécialisée. Celle-ci ai<strong>de</strong> à la mise en forme <strong>de</strong>s attentessouvent confuses du côté du groupe <strong>de</strong> pairs <strong>et</strong> les fait évoluer, elle veille à la faisabilité du proj<strong>et</strong> <strong>et</strong>stimule les <strong>jeunes</strong>. Bref, elle remplit <strong>de</strong>s fonctions essentielles d’intermédiation <strong>et</strong>d’accompagnement <strong>de</strong> l’action qui se déploie grâce à la dynamique du groupe 159 . A l’arrivée,cependant, le groupe initial n’existe plus. Chemin faisant, il s’est transformé accueillant <strong>de</strong> nouveauxindividus alors que d’autres se sont éloignés. La formalisation <strong>de</strong> l’action autour d’un proj<strong>et</strong> précis aprovoqué une recomposition du groupe dont les contours se sont complètement modifiés.Sans doute, une évolution aurait eu lieu même sans l’émergence du proj<strong>et</strong> particulier. Lesorganisations <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong> se pérennisent rarement dans le temps avec une composition stable.Néanmoins, dans le cas présent, le proj<strong>et</strong> d’activité <strong>et</strong> sa mise en œuvre ont perturbé l’agencementinterne du groupe <strong>et</strong> ont déclenché le changement. Le processus, i<strong>de</strong>ntifié ici à travers un exempleprécis mais largement observé dans les trois sites, est celui <strong>de</strong> la transformation du groupe naturelsous l’eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> l’intervention éducative.Ce phénomène n’est pas sans poser question aux équipes. « Quand on mène une action avec legroupe, on prend le risque <strong>de</strong> le défaire, cela peut avoir du bon mais peut être pire » confie unéducateur qui se fait involontairement le porte parole <strong>de</strong> ses collègues. Tous, en eff<strong>et</strong>, ont uneconscience claire du dilemme qui se présente à eux : s’appuyer sur la ressource que constituent lesrassemblements spontanés pour aller plus facilement vers les <strong>jeunes</strong> dans une visée éducative <strong>et</strong>préventive, mais risquer <strong>de</strong> détruire c<strong>et</strong>te ressource, <strong>de</strong> casser une dynamique interne souventimparfaite ou même inquiétante, mais qui a le mérite d’offrir un cadre <strong>de</strong> sociabilité à ceux qui yparticipent. L’intervention éducative déplace ce qui fait lien entre les <strong>jeunes</strong> <strong>et</strong>, par là même, détruitpour construire autrement. « C’est nous qui donnons du sens quand on constitue les groupes »Extérieure au groupe, l’intervention professionnelle donne un autre sens à la réunion <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong>.C<strong>et</strong>te opération <strong>de</strong> substitution d’un sens à un autre s’effectue au profit <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> qu’il fautprotéger <strong>et</strong> inscrire dans <strong>de</strong>s dynamiques positives, mais comporte une part aléatoire <strong>et</strong> incontrôlée.Là rési<strong>de</strong> le risque, quelles que soient la technicité <strong>et</strong> la bonne volonté <strong>de</strong>s intervenants.Une <strong>de</strong>s conséquences immédiatement visibles <strong>de</strong> l’empreinte éducative est donc la modification <strong>de</strong>la composition du groupe. Ce changement ne procè<strong>de</strong> pas d’une volonté intentionnelle <strong>de</strong> ré agencerle groupe. Mais il s’opère au fur <strong>et</strong> à mesure du processus éducatif qui conduit insensiblement à159 Voir Partie 1, chapitre 1 – 3 « Le skate park : offrir aux <strong>jeunes</strong> un espace bien à eux »<strong>Groupes</strong> <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong> <strong>et</strong> <strong>pratiques</strong> <strong>de</strong> prévention spécialisée – CTPS 2010 - Page 171
organiser autrement les collectifs en fonction <strong>de</strong>s objectifs qui se <strong>de</strong>ssinent. Dans ce processus quiconduit à une réorganisation, sont actifs chacun à leur façon les éducateurs qui ouvrent <strong>de</strong>sperspectives sous forme <strong>de</strong> proj<strong>et</strong> d’activité <strong>et</strong> <strong>de</strong> proposition d’ai<strong>de</strong>, <strong>et</strong> les <strong>jeunes</strong> eux-mêmes. C’esten fonction <strong>de</strong> la façon dont les <strong>jeunes</strong> reçoivent ces perspectives, s’ils y adhérent ou non <strong>et</strong> s’ilscontribuent à leur élaboration, que le groupe se recompose. Ainsi s’effectue le passage du groupenaturel au « groupe constitué ».« On est fabricant <strong>de</strong> groupe »Le groupe constitué est donc celui qui naît par <strong>et</strong> pour l’action éducative. C’est en se sens que secomprend le propos d’un responsable <strong>de</strong> Prévention affirmant : « on est fabricant <strong>de</strong> groupe ». L<strong>et</strong>errain perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> distinguer trois schémas <strong>de</strong> fabrication <strong>de</strong> ce type <strong>de</strong> groupe.Dans un premier cas, c’est avec un groupe <strong>de</strong> pairs qu’émerge l’idée d’une action : « on a démarréavec un groupe <strong>de</strong> potes qui se connaissaient bien ». Les <strong>jeunes</strong> déjà soudés sollicitent l’éducateur,ou celui-ci leur adresse une proposition d’activité, <strong>de</strong> type ludique ou sportive, à partir <strong>de</strong> ce qu’ilperçoit du groupe <strong>et</strong> <strong>de</strong>s goûts communs. Le proj<strong>et</strong> se construit collectivement laissant une largeplace à l’initiative <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong>, évolue, mûrit, se réoriente modifiant parfois l’assemblage <strong>de</strong> départ.Ici, le groupe <strong>de</strong> pairs <strong>de</strong>vient un groupe constitué, dans le sens où sa vie interne s’organise enréférence au proj<strong>et</strong>. Le séjour à Londres dans le cadre du dispositif Scopados illustre ce schéma 160 .Les adolescents, copains qui se r<strong>et</strong>rouvent dans le quartier, sont les artisans <strong>de</strong> ce proj<strong>et</strong> qui consisteà assister à un match <strong>de</strong> foot à Londres. Le proj<strong>et</strong> prend vie grâce à l’implication <strong>de</strong> ce p<strong>et</strong>it collectifpartageant un fort intérêt pour le foot <strong>et</strong> apte à saisir la perspective offerte par l’éducateur qui, dansc<strong>et</strong> exemple, mobilise une procédure spécifique pour réaliser le voyage.Par différence, le collectif peut n’exister que par l’action éducative. Il ne préexiste pas dans l’espacepublic comme c’est le cas précé<strong>de</strong>mment, mais résulte d’une construction volontaire. L’éducateurréunit <strong>de</strong>s individus, déjà connus, autour d’un proj<strong>et</strong> commun. En amont, le travail <strong>de</strong> rue ou lesaccompagnements individuels ont donné la possibilité d’i<strong>de</strong>ntifier <strong>de</strong>s situations, <strong>de</strong>s attentes, <strong>de</strong>scapacités susceptibles <strong>de</strong> se croiser <strong>et</strong> <strong>de</strong> se rapprocher. L’éducateur est l’artisan <strong>de</strong> cerapprochement, comme dans l’exemple <strong>de</strong> l’équipe féminine <strong>de</strong> foot 161 . Les <strong>jeunes</strong> filles n’étaientpas étrangères les unes aux autres mais elles n’étaient pas proches non plus. Leur rassemblementétait improbable dans le cadre d’un processus naturel, mais se révèle possible <strong>et</strong> fructueux en lienavec une activité <strong>de</strong> type sportif qui constitue le dénominateur à l’ensemble <strong>de</strong>s personnes.Entre ces <strong>de</strong>ux schémas qui correspon<strong>de</strong>nt à <strong>de</strong>s <strong>pratiques</strong> distinctes, il existe une troisième voie.Celle-ci combine le collectif <strong>et</strong> l’individuel pour former une nouvelle entité. Selon les réalitéssociologiques <strong>et</strong> les objectifs éducatifs, les configurations sont variées. Le groupe peut provenir <strong>de</strong>l’addition <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux p<strong>et</strong>its collectifs. Par exemple, quelques garçons <strong>et</strong> quelques filles issus <strong>de</strong> <strong>de</strong>uxquartiers différents se rencontrent à l’initiative <strong>de</strong>s éducateurs <strong>et</strong> composent le groupe qui part enTunisie 162 . Ou bien <strong>de</strong>s personnes isolées sont intégrées à un ensemble. C’est ainsi que démarre160 Voir Partie 1, chapitre 3 – 3 « Scopados : séjour à Londres autour d’un match <strong>de</strong> football »161 Voir Partie 1, chapitre 2 – 3 « Le foot féminin ou le sport comme levier d’action avec les groupes ».162 Voir Partie 1, chapitre 2 – 3 « Le voyage aux portes du désert : une expérience collective propice à la découverte <strong>de</strong>sautres <strong>et</strong> <strong>de</strong> soi-même »<strong>Groupes</strong> <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong> <strong>et</strong> <strong>pratiques</strong> <strong>de</strong> prévention spécialisée – CTPS 2010 - Page 172
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