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Ce que j'ai découvert, en ne levant qu'un coin du voile, doit faire<br />
juger de ce qui reste <strong>à</strong> découvrir ; d'ailleurs, je suis 1as de remuer ces<br />
ordures ; et mon lecteur, sans doute, éprouve la, même lassitude.<br />
Est-ce, je le demande, <strong>à</strong> la corruption étrange des siècles passés,<br />
ou <strong>à</strong> la loi qui commande la continence, est-ce <strong>à</strong> ces deux causes réunies<br />
qu'il faut attribuer les désordres du clergé ? Cette question sort de mon<br />
sujet : j'en laisse <strong>à</strong> d'autres la solution ; mais je ne puis m'empêcher de<br />
rapporter ici ce que disait le savant Pie II : Si l'on a eu de bonnes<br />
raisons pour défendre le mariage aux prêtres, il en est de meilleures<br />
pour le leur permettre 414 .<br />
Voil<strong>à</strong> cependant quels étaient ces siècles si vantés par l'ignorance<br />
et par l'habitude indéracinable de louer le passé aux dépens du présent ;<br />
voil<strong>à</strong> quels étaient ces temps où régnaient, dit-on, l'innocence et la<br />
pureté ; voil<strong>à</strong> ces mœurs qu'on nous donne pour exemple ; voil<strong>à</strong> ces<br />
hommes, ces bons aïeux, qu'on nous cite pour modèles 415 .<br />
Indécences dans les lois, indécences dans les mœurs publiques et<br />
dans la vie privée, indécences dans les jeux, indécences dans les<br />
productions des arts, indécences dans les cérémonies civiles, dans le<br />
culte, et jusque dans les lieux les plus sacrés.<br />
233<br />
Je le demande maintenant, le culte du Phallus ou de Priape était-il<br />
étranger <strong>à</strong> de telles mœurs ? Son indécence ne pouvait-elle pas s'associer<br />
414 Sacerdotibus magna ratione sublatas nuptias, majori restituendas videri. (Platin, de vitis<br />
Pontificum.)<br />
415 Les mœurs dont je viens de donner un faible aperçu, ne se rapportent <strong>à</strong> peu près qu'aux XIVè,<br />
Xvè et XVIè siècles. Les louangeurs du temps passé, ne sachant guère fixer l'époque fortunée où<br />
régnaient l'innocence et les vertus, diront peut-être qu'elle existait dans les siècles précédents. Si mon<br />
sujet m'eût permis de parler des mœurs des Xè, XIè et XIIè siècles, quels tableaux affreux de crimes,<br />
d'erreurs absurdes et de malheurs j'aurais eu <strong>à</strong> offrir ! Des maladies contagieuses, la famine, les<br />
guerres, ont désolé' presque continuellement la France pendant ces trois siècles : point de lois, point<br />
d'administration publique. Le plus fort se faisait obéir : les crimes restaient impunis et quelquefois<br />
honorés ; la religion était de la magie; une grande partie des états restaient incultes ; on vendait<br />
publiquement dans les marchés, de la chair humaine : la stupidité et la férocité des hommes égalaient<br />
la misère publique.