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<strong>à</strong> de telles indécences ? Ceux qui souffraient des nudités réelles, des<br />
actions bouffonnes et obscènes jusque dans les cérémonies religieuses,<br />
jusque dans les lieux saints, jusque sur les autels de la divinité, ne<br />
pouvaient-ils pas s'accommoder d'une nudité factice, d'une nudité en<br />
représentation ? Le culte de Priape, qualifié du nom de quelque saint,<br />
présenté sous les formes chrétiennes, pouvait-il choquer les opinions de<br />
nos bons aïeux, et ne pas concorder avec elles ? Des mœurs aussi<br />
corrompues, des pratiques aussi abusives, n'étaient-elles pas en<br />
harmonie avec les pratiques des cultes antiques ? Ceux qui rendaient un<br />
culte <strong>à</strong> de prétendus nombrils, <strong>à</strong> de prétendus prépuces de Jésus-Christ,<br />
<strong>à</strong> la queue de l'âne conservée <strong>à</strong> Gènes, étaient-ils bien éloignés du culte<br />
du Phallus 416 ?<br />
Quant <strong>à</strong> moi, je pense, et plusieurs personnes partageront mon<br />
sentiment, que le culte de Priape christianisé est moins attentatoire <strong>à</strong> la<br />
pudeur publique, choque moins la raison, est moins opposé <strong>à</strong> la religion,<br />
moins avilissant pour elle, que ne le sont la plupart des usages, des<br />
cérémonies, des abus, des désordres que je viens d'exposer.<br />
416 On compte une douzaine de prépuces <strong>à</strong> Jésus-Christ. Il y eu avait un chez les moines de<br />
Coulombs, un autre <strong>à</strong> l'abbaye de Charroux, un troisième <strong>à</strong> Hildesheim en Allemagne, un quatrième <strong>à</strong><br />
Rome, dans Saint-Jean-de-Latran, un cinquième <strong>à</strong> Anvers, dont j'ai parlé dans cet ouvrage, un sixième<br />
au Puy-en-Velay, dans l'église de Notre-Dame, etc., etc.<br />
Les nombrils de Dieu étaient tout aussi multipliés. Je ne puis m'empêcher de citer, <strong>à</strong> cet égard, une<br />
anecdote peu connue. A Châlons, dans l'église collégiale de Notre-Dame-de-Vaux, était un saint<br />
nombril de Dieu, qui faisait beaucoup de miracles. L'évêque du diocèse, J.-B. de Noailles, s'avisa, en<br />
1707, de faire ouvrir, en présence de plusieurs experts, le reliquaire qui le contenait. On y trouva, au<br />
lieu du saint nombril, trois grains de sable. Les chirurgiens et autres gens de l'art en dressèrent leur<br />
procès-verbal. Les chanoines, furieux de cette découverte, qui nuisait <strong>à</strong> la dévotion populaire, se<br />
pourvurent contre l'évêque indiscret, et soutinrent, avec chaleur, que ces trois grains de sable étaient<br />
le saint nombril. Il y eut plusieurs procédures <strong>à</strong> ce sujet, qu'on peut voir dans un imprimé intitulé :<br />
Lettre d'un Ecclésiastique de Châlons aux docteurs de Paris.<br />
Quant <strong>à</strong> la queue d'âne, conservée précieusement <strong>à</strong> Gènes, dans l'église des Dominicains, il en est<br />
fait mention dans un livre d'église concernant l'office de la semaine sainte. En voici les expressions :<br />
« Degno e encora di sapere come la coda d'une di quei duo animali, in questo atto adoperati d'el<br />
signore, senza arte humana incorreptibile si conserva oggi di in Genoa pressa mei padri di san<br />
Dominico, facendo pia remenbrenza d'ell humilita c'hebbe il figliolo di Dio per noi in questa intrata.<br />
» (Jeaninus e Capugnano ord. Praedicatorum, in declarationibus super officium hebdomadae<br />
sanctiae. Venitiis, 1736, p.12.)<br />
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