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plusieurs peuples de l'Orient peu de siècles avant l'ère chrétienne,<br />
qu'elles se sont perpétuées en certains lieux quelques siècles après, et<br />
qu'elles subsistent aujourd'hui dans plusieurs cantons de l'Inde. Quant a<br />
l'usage qui obligeait les femmes <strong>à</strong> partager leur lit avec les voyageurs, il<br />
était sans doute plus général encore ; car, malgré les ravages d'un long<br />
espace de temps, de nombreux restes s'en sont conservés jusqu'<strong>à</strong> nos<br />
jours 422 .<br />
240<br />
422 Kamul est un district de la province de Tanguth, autrefois sous la domination du grand Kan de<br />
Tartarie. Les habitants ont une langue particulière et adorent des idoles. Lorsqu'un voyageur arrive<br />
dans ce pays, le maître de la maison où il a choisi son domicile enjoint <strong>à</strong> sa femme, <strong>à</strong> ses filles et <strong>à</strong> ses<br />
parentes, de satisfaire <strong>à</strong> tous les désirs de l'étranger. Il abandonne ensuite sa maison, sans doute pour<br />
n'être pas témoin importun de l'usage qu'on va en faire, et ne rentre chez lui que lorsque l'étranger en<br />
est parti. Cette manière d'exercer l'hospitalité est regardée par ce peuple comme un acte de religion.<br />
La beauté des femmes de ce pays devait accroître la dévotion des voyageurs.<br />
Lorsque Mongu-Kan monta sur le trône, en 1251, il ordonna l'abolition de cette coutume. Pendant<br />
trois ans elle n'eut pas lieu ; mais, dans cet intervalle, les productions de la terre ayant manqué,<br />
quelques autres malheurs étant survenus aux habitants, ils envoyèrent auprès de Mongu-Kan des<br />
ambassadeurs chargés de solliciter le rétablissement de cet usage. Le Kan l'accorda en faisant cette<br />
réponse. « Je sais qu'il est de mon devoir de mettre des bornes <strong>à</strong> cette coutume scandaleuse ; mais,<br />
puisque vous tirez gloire de votre honte, vous pouvez vous en couvrir ; et vos femmes peuvent<br />
continuer désormais <strong>à</strong> rendre leurs services charitables aux étrangers. » Marco Polo, qui rapporte<br />
cette anecdote, et qui voyageait dans ce pays vers la fin du XIIIè siècle, dit que cet usage subsistait<br />
encore de son temps. (Histoires des voyages et découvertes dans le Nord, par Forster, t. I, pp. 117-<br />
118.)<br />
Le bourg de Martaouan, situé <strong>à</strong> dix lieues d'Alep, est célèbre parmi les voyageurs européens, <strong>à</strong><br />
cause du même usage qui y est encore aujourd'hui en vigueur. Le chef du pays, ainsi que chaque père,<br />
chaque mari, et même chaque amant, vient offrir aux étrangers sa fille, sa femme, son amante. Les<br />
voyageurs n'ont que l'embarras du choix, et ne sont tenus qu'<strong>à</strong> marquer leur reconnaissance par<br />
quelques pièces de monnaie. Un Français, qui a passé dans ce lieu, en rapporte l'anecdote suivante :<br />
« Les habitants n'oublient pas, dit - il, de citer aux étrangers l'histoire d'un bon vieux missionnaire<br />
qui, allant dans l'Inde, passa par Martaouan. Ce pieux sexagénaire, préservé, par son âge, des<br />
tentations de toutes ces sirènes, croyait le lendemain que ses jeunes confrères auraient été plus sages<br />
que les compagnons d'Ulysse ; mais il eut la douleur de se voir forcé, comme boursier de la<br />
compagnie, de payer <strong>à</strong> ces hospitaliers le prix de leur complaisance. » (Mémoires historiques du<br />
voyage de Ferrières-Sauvebeuf.)<br />
Même usage <strong>à</strong> Chichiri, dans l'Arabie Heureuse ; et une récompense légère suffit aux jeunes filles<br />
qui s'honorent d'accorder leurs faveurs aux étrangers.<br />
Les Tschuktschs offrent de même leurs femmes aux voyageurs ; mais ceux-ci, pour s'en rendre<br />
dignes, doivent se soumettre <strong>à</strong> une épreuve dégoûtante. La fille ou la femme qui doit passer la nuit<br />
avec son nouvel hôte, lui présente une tasse pleine de son urine ; il faut qu'il s'en rince la bouche. S'il<br />
a ce courage, il est regardé comme un ami sincère, sinon il est traité comme un ennemi de la famille.