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De Zaïssansk au Thibet<br />
et aux sources du Fleuve Jaune<br />
Peu après avoir retrouvé le cours supérieur du Mour-oussou,<br />
nous vîmes sur le bord du chemin le cadavre d’un pèlerin, qui sans<br />
doute avait voulu aller seul à Lhassa ou qui avait été abandonné<br />
par la caravane dont il faisait partie. Il avait près de lui son bâton,<br />
une sacoche, une tasse de terre, et un petit sac rempli de thé. Les<br />
loups et les vautours l’avaient déjà presque entièrement dévoré.<br />
Dans quelques semaines les bêtes de proie auront fini leur œuvre,<br />
le vent aura dispersé ces ossements, et rien ne rappellera aux<br />
nouveaux pèlerins le sort malheureux d’un de leurs confrères.<br />
Au delà du cours supérieur du Mour-oussou, c’est-à-dire sur la<br />
rive droite de la rivière, le terrain s’élève graduellement vers le sud<br />
et y forme un vaste plateau, peut-être le plus haut du Thibet. Sur le<br />
sommet de ce plateau s’étend, dans la direction est-ouest, une<br />
chaîne de montagnes couvertes de neiges éternelles, connue sous<br />
le nom de Tan-la, nom qu’on applique également à tout le plateau.<br />
L’ascension de la pente septentrionale ainsi que la descente sur le<br />
versant méridional sont très faciles, quoique le col que suit le<br />
chemin des caravanes soit à 5.000 mètres d’altitude. La crête n’est<br />
qu’à 630 mètres au-dessus de la vallée du Mour-oussou, et à 600<br />
au-dessus de celle du San-tchiou, qui roule ses eaux au pied<br />
méridional. Sur cette crête, les hauteurs couvertes de neiges<br />
permanentes ne forment pas une ligne continue, mais s’élancent de<br />
la masse principale comme des îles. Vers l’ouest le Tan-la s’étend à<br />
250 verstes du point où nous l’avons passé, puis il s’abaisse<br />
doucement et se perd dans une plaine ondulée. Selon le dire des<br />
Mongols, il s’étend également à 200 verstes à l’est, il irait alors<br />
rejoindre le Baïan-Khara-oula et formerait avec lui la ligne de<br />
partage entre les sources des plus grands fleuves de l’Asie<br />
orientale, le fleuve Bleu d’un côté, le Cambodge et le Salouen de<br />
l’autre. Il est certain que tous les cours d’eau descendant du<br />
versant septentrional du Tan-la vont au Mour-oussou et par suite<br />
au Ian-tsy-tsian. D’autre part, la pente méridionale donne<br />
naissance à la grande rivière Zatcha-tsampo, qui ta se perdre dans<br />
le lac Mityk-Djansou, le même que le pandit Naïn-Sing désigne sous<br />
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