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De Zaïssansk au Thibet<br />
et aux sources du Fleuve Jaune<br />
Les Thibétains nomades parlent la même langue que ceux<br />
de Lhassa, mais leur idiome diffère beaucoup de celui des<br />
Tangouts ; du reste il ne nous a pas été possible de l’étudier. En<br />
causant entre eux, ils gesticulent beaucoup avec leurs doigts,<br />
comme les Chinois. L’inférieur parlant à son supérieur se montre<br />
très obséquieux, et naturellement le chef se montre très arrogant<br />
envers son subordonné. Les hommes et les femmes fument, mais<br />
ils ne s’enivrent pas. L’ivrognerie est un vice presque inconnu dans<br />
l’Asie centrale. On jette les morts en pâture aux bêtes de proie ; il<br />
n’y a que les cadavres des lamas que l’on recouvre d’un peu de<br />
terre, et cependant leur mémoire est fidèlement conservée.<br />
Administrativement les Thibétains nomades ne relèvent pas du<br />
Dalaï-lama, mais des autorités chinoises de Sinin : la province de<br />
Sinin s’étend donc au delà du Koukou-nor, comprenant le Tsaïdam<br />
et tout le nord-est du Thibet jusqu’à la province de Ouï.<br />
Les Thibétains dépendant de Sinin se divisent en sept aïmacks<br />
ou oros, dont trois nomadisent le long de la rivière San-tchiou, les<br />
quatre autres sur le Tan-tchiou, depuis sa sortie du Tan-la jusqu’à<br />
son confluent. Ils comptent au total 1.340 tentes, soit environ<br />
7.000 individus.<br />
Nous fûmes obligés de passer dix-huit jours dans notre<br />
campement du mont Boumza, attendant avec impatience une<br />
réponse de Lhassa. Les premiers jours furent consacrés à des<br />
excursions dans les environs ; quant aux cosaques, ils s’occupaient<br />
à réparer leurs vêtements et le harnachement des animaux.<br />
Lorsque tout fut mis en ordre, nous ne savions plus comment<br />
chasser notre ennui, et notre inactivité dans une iourte froide et<br />
remplie de fumée nous pesait plus que toutes les fatigues de nos<br />
voyages à travers les montagnes. L’incertitude sur le sort de notre<br />
expédition nous empêchait aussi de jouir de ce repos forcé, qui<br />
nuisait même à notre santé.<br />
Notre unique distraction était la chasse aux gypaètes et aux<br />
vautours qui s’approchaient souvent de notre bivouac. N’ayant<br />
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