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De Zaïssansk au Thibet<br />
et aux sources du Fleuve Jaune<br />
Voici la traduction textuelle du document que nous reçûmes le<br />
lendemain : « Prenant en considération que le Thibet est une contrée<br />
de religion, il arrive que, auparavant et après, y viennent des<br />
individus d’autres pays ; mais ceux qui dès les temps les plus reculés<br />
n’ont pas le droit d’y venir selon la décision unanime des princes, des<br />
dignitaires et du peuple, n’y sont pas reçus, et l’ordre est donné de<br />
leur en empêcher l’entrée au prix même de la vie, ordre que ratifie le<br />
souverain, par l’intermédiaire de l’amban résidant au Thibet. A<br />
l’heure qu’il est, dans le village de Pouboum-tchoun, relevant du Tra-<br />
mar de Naptchou, dans la dixième lune, le treizième jour parurent,<br />
avec l’intention de pénétrer au Thibet, Nicolas Chibalissiki, amban de<br />
Tchagan-khans, le toussoulatchi (lieutenant) Akélon, dix serviteurs et<br />
soldats. En ayant reçu l’avis par l’administration locale, beaucoup de<br />
Thibétains ont été envoyés pour s’en convaincre ; après un séjour de<br />
vingt jours, nous les priâmes de retourner d’où ils étaient venus, et,<br />
pendant une entrevue personnelle, nous leur avons exposé<br />
minutieusement toutes les raisons pour lesquelles on ne peut<br />
pénétrer dans l’intérieur du Thibet.... »<br />
La lecture terminée, le chef cacheta le papier et me le remit.<br />
Aussitôt je donnai l’ordre aux cosaques de lever le camp. Sous<br />
l’heureuse impression de leur réussite, les émissaires prirent congé<br />
de nous avec beaucoup d’amabilité. Ils suivirent longtemps des<br />
yeux la marche de notre caravane, jusqu’à ce qu’elle disparût<br />
derrière un rocher.<br />
Il est probable qu’à Lhassa notre départ sera représenté comme<br />
un effet des conjurations des lamas et de la toute-puissance de leur<br />
chef.<br />
Je partis le cœur gros : l’ignorance et la barbarie humaine me<br />
fermaient encore une fois la route de Lhassa.<br />
J’étais d’autant plus contrarié que c’était là ma quatrième<br />
tentative pour pénétrer dans la capitale du Dalaï-lama. En 1873<br />
j’avais dû y renoncer à cause de la perte de tous mes chameaux,<br />
et, en 1877, par suite des difficultés que m’avait suscitées Iakoub-<br />
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