Épreuve de contrôle - L2C2 - CNRS
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Philosophie : modularité et psychologie évolutionniste<br />
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ne serait un module que s’il possédait l’ensemble <strong>de</strong>s caractéristiques énumérées<br />
plus haut 11 . Cette compréhension ne semble pas favorisée par Fodor qui,<br />
dans son livre <strong>de</strong> 1983, en préférait une autre, quand même assez proche. Les<br />
modules, disait-il, constituent <strong>de</strong>s « espèces naturelles ». Pour cette raison, ils<br />
ont tendance à avoir en commun un ensemble <strong>de</strong> propriétés (celles que nous<br />
avons présentées en section 2.1). Les théories sur les espèces naturelles (voir<br />
par exemple Boyd, 1991) expliquent en général la co-présence <strong>de</strong>s propriétés<br />
par l’action <strong>de</strong> structures ou <strong>de</strong> processus causaux sous-jacents, qu’on considère<br />
habituellement comme l’essence <strong>de</strong> l’espèce naturelle en question. Si tel<br />
est le cas, certains <strong>de</strong>s traits <strong>de</strong> la liste sont plus centraux et importants que<br />
d’autres : en fait, <strong>de</strong> tous, seule l’encapsulation informationnelle semble alors<br />
nécessaire. C’est d’ailleurs ce qu’affirmait récemment Fodor pour qui l’encapsulation<br />
informationnelle forme « le cœur <strong>de</strong> la modularité » (2000, p. 63). On<br />
peut donc penser qu’un système est modulaire pour autant qu’il est encapsulé,<br />
quelles que soient les autres propriétés qu’il possè<strong>de</strong> (il les possè<strong>de</strong>rait<br />
acci<strong>de</strong>ntellement pour ainsi dire).<br />
On peut donc revenir sur la distinction établie par Fodor entre cognition<br />
centrale et modularité : même si, contrairement aux réflexes, les <strong>de</strong>ux types <strong>de</strong><br />
phénomènes sont intelligents, la cognition <strong>de</strong> haut niveau est, selon lui, tout ce<br />
que la perception (assurée par les modules) n’est pas. Elle est lente, profon<strong>de</strong>,<br />
globale, sous <strong>contrôle</strong> volontaire, associée à <strong>de</strong>s aires neurales diffuses, et,<br />
comme le note Fodor, surtout pas encapsulée : plus le processus est <strong>de</strong> haut<br />
niveau, « plus il repose sur l’intégration d’informations provenant <strong>de</strong> domaines<br />
superficiellement dissimilaires » (1990, p. 202).<br />
Nous pouvons résumer ainsi les relations entre les différents types <strong>de</strong><br />
modules dont nous avons parlé. Les modules boîtologiques sont <strong>de</strong>s coquilles<br />
vi<strong>de</strong>s, <strong>de</strong>s caractérisations fonctionnelles, qui sont neutres quant aux propriétés<br />
(modulaires) <strong>de</strong>s systèmes par lesquels ils se réalisent. Il est tout à fait possible<br />
que certaines <strong>de</strong> ces boîtes ne correspon<strong>de</strong>nt pas à <strong>de</strong>s modules dans le sens<br />
dont nous venons <strong>de</strong> parler, mais plutôt à <strong>de</strong>s éléments du système central<br />
(on pense par exemple à l’attention ou au système <strong>de</strong> supervision dans le<br />
modèle <strong>de</strong> Shallice, 1988). La modularité boîtologique inclut donc à la fois<br />
les modules et les éléments du système central non modulaire. Les modules<br />
chomskyens, quant à eux, peuvent être <strong>de</strong>s composants <strong>de</strong>s modules fodoriens<br />
(quoique pas nécessairement). La plupart du temps, les bases <strong>de</strong> données<br />
innées sont traitées par <strong>de</strong>s mécanismes cognitifs encapsulés et spécifiques à<br />
un domaine (Coltheart, 1999, p. 118 ; Fodor, 2003, p. 97 ; Segal, 1996, p. 144).<br />
On peut cependant envisager une architecture dans laquelle il n’y aurait que<br />
<strong>de</strong>s modules chomskyens qui seraient utilisés par un mécanisme d’inférence<br />
<strong>Épreuve</strong> <strong>de</strong> <strong>contrôle</strong><br />
11. Mais ces propriétés admettent <strong>de</strong>s <strong>de</strong>grés. Par exemple, un module peut être plus<br />
ou moins pénétrable cognitivement ou il peut être plus ou moins encapsulé. Si tel<br />
est le cas, la modularité n’est pas une affaire <strong>de</strong> tout ou rien, elle admet elle aussi <strong>de</strong>s<br />
<strong>de</strong>grés.