jung-un-voyage-vers-soi
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pour conseil à ses interlocuteurs de tout faire pour focaliser l’attention
d’Hitler sur la Russie, car c’est ainsi, pense-t-il, qu’il perdra la guerre.
L’histoire ne lui donnera pas tort.
En février 1943, alors que les Allemands viennent de perdre la bataille
de Stalingrad, il est cette fois contacté par l’agent du Bureau des services
stratégiques américains (OSS) en poste en Suisse : Allen Dulles. Celui-ci
essaie de recueillir des informations qui pourraient être utiles aux Alliés.
Dulles avait eu vent des théories de Jung sur la psychologie allemande et de
l’usage qu’en avaient fait ses confrères anglais du Foreign Office ; c’est
pourquoi il souhaite s’informer auprès du psychologue suisse sur la psychologie
des responsables nazis, et notamment celle du Führer. Dulles est
informé des attaques contre Jung émanant de psychanalystes freudiens qui
l’accusent d’être favorable au régime nazi, et il demande un rapport
complet à ses services. Sa lecture le convainc du caractère infondé de ces
allégations et il entame alors une collaboration très étroite avec Jung,
célébrant ainsi « le mariage encore expérimental de l’espionnage et de la
psychanalyse », selon son expression. Ils se voient plusieurs fois par
semaine jusqu’à la fin de la guerre, et Dulles envoie les notes de Jung à sa
hiérarchie, demandant dans un télégramme au colonel David Bruce de
l’OSS (Office of Strategic Services) d’être particulièrement attentif au
profil que le psychiatre suisse dresse d’Hitler : il s’agit d’un psychopathe,
qui ira, selon lui, jusqu’au bout de sa folie, même s’il ne faut pas exclure
« l’éventualité du suicide dans un moment de désespoir 12 ».
Les notes de Jung sont si appréciées des services secrets américains
qu’en 1945 le général Eisenhower, commandant suprême des forces alliées
en Europe, lui demande conseil sur la manière d’aider la population
allemande à accepter la défaite. Jung lui fait parvenir une note dans laquelle
il l’encourage à diffuser auprès des civils allemands des messages faisant
appel à « ce que le peuple allemand avait de meilleur, sa foi en des idéaux,
son amour de la vérité et de l’humain. Ces qualités viennent combler le