jung-un-voyage-vers-soi
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qu’à la rencontre dans l’âme à une puissance intérieure. Jung parle du
transcendantalisme absolu en termes de déracinement : le fidèle ne cherche
plus le divin à l’intérieur de son âme et n’a plus accès à lui que par
l’extérieur, c’est-à-dire l’autorité institutionnelle et la norme théologique. Il
en découle un moralisme étouffant et un rationalisme dogmatique
desséchant : « Il peut fort bien se produire qu’un chrétien croyant à toutes
les figures sacrées demeure sous-développé et inchangé au plus profond de
son âme, parce qu’il a “tout Dieu dehors” et qu’il ne le rencontre pas dans
son âme. […] L’homme intérieur est resté à l’écart et par conséquent
inchangé. L’état de son âme ne correspond pas à la croyance qu’il
professe 4 . » À cet égard, Jung rappelle souvent que la notion d’« imitation
du Christ », telle que l’enseigne la prédication chrétienne, reste tributaire de
cette compréhension extérieure de la spiritualité : on cherche à imiter le
Christ comme un modèle ou un objet extérieur, en le vénérant et en le
suivant, jusqu’à vouloir revivre, pour les athlètes de la foi, sa stigmatisation
et sa passion. Jung en a une tout autre compréhension : « L’exigence de
l’imitation du Christ, c’est-à-dire celle de vivre suivant l’exemple du Christ
en visant à lui ressembler, devrait tendre au développement et à l’exaltation
de l’homme intérieur en chacun 5 . » De même que Jésus a été fidèle à sa
mission intérieure en donnant sa vie, de même chaque homme doit
comprendre quelle est la vocation profonde, personnelle, singulière qui lui
permettra de se réaliser pleinement en tant qu’être humain et d’accomplir
librement sa destinée. Or cela ne passe pas par une imitation mécanique et
formelle de la vie de Jésus, ce qui est par ailleurs terriblement écrasant et
serait impossible pour la plupart des hommes.
D’ailleurs, Jung pense qu’au-delà de l’homme Jésus, la figure du Christ
est une « personnification de l’archétype du Soi ». Il emploie le terme
Anthropos pour parler de l’archétype du héros, de l’homme accompli (homo
maximus), dont certaines figures historiques – le Bouddha ou le Christ – et
mythologiques – Osiris, Dionysos ou Mithra – sont des personnifications.