jung-un-voyage-vers-soi
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intellectuelle, elle mène une enquête très rigoureuse pendant huit ans et a
notamment accès aux archives de la famille Jung, jusqu’alors inaccessibles
aux chercheurs. Elle rencontre des centaines de témoins, épluche des
milliers de documents, prend connaissance avec minutie de tous les faits et
propos incriminés et consacre une part importante de son travail à démêler
le vrai du faux concernant les allégations de sympathies pro-nazies et
d’antisémitisme de Jung. N’ayant trouvé meilleure source sur le sujet, je
vais essayer de synthétiser le fruit de ses travaux dans les pages suivantes,
en évoquant quelques autres sources fiables, qui ne font que corroborer ses
conclusions : Jung n’était ni nazi ni antisémite, mais il a commis quelques
graves erreurs en faisant preuve d’orgueil, d’imprudence et de naïveté.
Depuis 1930, Jung est vice-président d’une association allemande
médicale de psychothérapie qui vise à fédérer tous les courants –
notamment freudiens, adlériens et jungiens : Allgemeine Ärtztliche
Gesellschaft für Psychotherapie. Cette association, qui a son siège à Berlin,
édite une revue médicale prestigieuse, le Zentralblatt für Psychotherapie,
largement diffusée en Europe. Dès l’arrivée d’Hitler au pouvoir, le
30 janvier 1933, l’association et la revue sont mises sous la coupe du
nouveau régime via Matthias Göring, un psychologue allemand, membre de
l’association et cousin de Hermann Göring, l’un des principaux leaders
nazis. En juin 1933, le président de l’association et rédacteur en chef de la
revue, Ernst Kretschmer, qui est juif, donne sa démission, en réaction aux
mesures antijuives qui, dès février 1933, commencent à restreindre les
libertés des Juifs (autorisation d’arrestations arbitraires, boycott des
commerces juifs, exclusion de la fonction publique, des universités, etc.).
Le 10 mai 1933 se produit, dans tout le pays, un terrible autodafé : des
dizaines de milliers de livres – dont tous les ouvrages de Freud – sont brûlés
sur la place publique par des étudiants nazis. On sait qu’en 1935 les lois sur
la citoyenneté du Reich – les sinistres lois de Nuremberg – qui visent la