Pas de bavards à la Muette

affaires aux ramifications complexes et lointaines, qu’il est
bon de connaître sur le bout du doigt l’histoire criminelle
du quartier où il opère, au moins depuis la Révolution de
1789. Ça permet, sinon de s’y retrouver aussi bien que lui,
du moins de ne pas le paumer en route. Eh bien, j’ai vu
qu’en effet c’est un coin tranquille, votre coin. Tellement
tranquille que, la semaine dernière, la bonne femme de la
rue Jasmin qui est tombée, complètement à poil, de son
cinquième étage, est restée tranquillement sur le trottoir
jusqu’à ce qu’un garçon laitier bute contre. Et je ne parle
pas de la fille du toubib de la rue Scheffer, ni du concierge
de l’avenue Henri-Martin, tous deux attaqués par des
gouapes inconnues.
— Tout ça, c’est des exceptions, bafouilla le brigadier,
rouge comme un coq, mais moins agressif. Des exceptions
qui confirment la règle. Dans l’ensemble, c’est un coin
tranquille…
Il devait faire partie du Syndicat d’initiative de
l’arrondissement.
— … Un coin tranquille, peuplé de gens tranquilles.
— On devrait aller rue Berton, maintenant, suggérai-je,
avec douceur. Un type tout ce qu’il y a de tranquille nous
y attend. Ça complétera notre documentation sur la
tranquillité du secteur.
Ce banc à moitié vermoulu, aux lattes jadis vertes,
semblait disposé là, entre un arbre et le petit bassin
spécialement pour nous. Florimond Faroux le considéra
d’un air morose et dit :
— Asseyons-nous !
Nous sortions du pavillon où s’ébattait une véritable