Pas de bavards à la Muette

— Dalor, c’est ça même. Vous êtes Bénech ?
— Oui.
— Enchanté, mon vieux…
Nous nous serrâmes la main :
— … Nous sommes collègues, je crois ?
— C’est ce qu’elle m’a dit.
— Entrez donc… Il entra. J’ajoutai :
— … Vous connaissez la boîte mieux que moi. On peut
se faire monter un vulnéraire quelconque ?
— J’ai tout ce qu’il faut chez moi, sourit-il, découvrant
des dents de jeune loup. À moins que vous n’aimiez pas le
gin…
— C’est mon digestif préféré. Mais je ne voudrais pas
commencer en me faisant rincer.
— Oh ! un verre, ça va, ça vient. Et puis… Son sourire
s’accentua :
— … Vous êtes chauffeur aussi, quoi ! Je ne vais pas
vous apprendre certaines choses.
Je soupirai :
— Le mec chez qui j’étais, en province, il buvait du
sirop d’orgeat.
— Me parlez pas de la province ! ricana-t-il.
— Oui, ils sont vachement arriérés, par là-bas. Eh bien,
allons chez vous, dis-je.
Nous changeâmes de chambre. Très calme,
apparemment aussi innocent que l’agneau qui vient de
naître, il m’avança une chaise et alla dans les lavabos
rincer deux timbales dépareillées qu’il posa sur la table en
compagnie d’une bouteille de gin. Cependant qu’il se
livrait à ces préparatifs, je lui avais servi mon petit