Pas de bavards à la Muette

— Je ne comprends pas.
— Mon œil, que tu ne comprends pas. Assieds-toi. Tu
me flanques le vertige.
Il s’assit. Au bord du pajot, comme précédemment, me
biglant de ses pâles mirettes écarquillées.
— Je vais te faire un dessin, Célestin. Tu ne vas tout de
même pas conserver ces bijoux en souvenir, hein ? T’es
pas sentimental à ce point. Alors, tu restitues bien
gentiment les bijoux à Mme Ailot, elle passe l’éponge, et
tu palpes cent sacs. C’est d’ailleurs bien à quoi tu
t’attendais, n’est-ce pas ? Une bonne petite transaction.
Un genre de pension alimentaire après divorce. Un bon
petit entruandage des familles sans risques ni danger.
Il reprit sa respiration. Ça lui demanda quelque trente
secondes. Ensuite, il reprit du gin. Trente secondes de
plus. Dehors, il flottait toujours. Il graillonna :
— Hum… Les bijoux ? Quels bijoux ?
— Quels bijoux ? Mais ceux que tu as fauchés à la mère
Ailot, eh, banaste. Écoute, frère Yves, je vais te dire une
bonne chose. T’es peut-être un fortiche, mais des
fortiches, j’en ai connu des tonnes. Et la plupart, à vouloir
trop jouer les fortiches, se sont trouvés les dindons. Si tu
veux prendre ce chemin, libre à toi. Moi, je m’en fous.
Mais si tu refuses le fric que t’offre la mère Ailot, tu es
cuit.
Il sourit.
— … C’est ça, marre-toi, poursuivis-je. Je sais ce que tu
penses. Tu te dis qu’il n’y a pas de danger que tu sois cuit,
parce que la mère Ailot ne portera pas le pet par crainte
du scandale, hein ? Compte là-dessus et bois un verre de