Pas de bavards à la Muette

Elle me lança un regard de bête traquée :
— Ah ! oui ?… Pourquoi ?… Est-ce que je vous ai
seulement entendu ? Ai-je seulement la tête à ça ?
— Eh bien, madame Ailot, maintenant que vous
m’entendez bien, je voudrais vous poser une dernière
question. Une question sans importance, mais qui ne
m’est pas dictée par la simple curiosité. C’est simplement
pour éprouver le climat de nos relations. Voyons,
madame, Yves Bénech était plus que votre chauffeur,
n’est-ce pas ?
Elle parut soulagée de voir enfin aborder ce sujet. Mais
elle ne répondit pas directement et se mit à pleurer :
— Vous êtes un monstre. Pourquoi me torturer ainsi ?
Ne suis-je pas assez punie ? Avec cet homme, le malheur
est entré chez nous…
— Je ne suis pas un moraliste, madame, et je ne me
permettrai pas de vous juger au nom d’une notion que
j’estime des plus relatives. Je suis dépourvu de préjugés
et je ne m’occupe pas autant que j’en ai l’air de ce qui ne
me regarde pas. Mais je voudrais savoir. Est-ce oui ?
Elle leva vers moi un visage ruisselant de larmes :
— Oui, souffla-t-elle.
— Merci. Bonsoir, madame.
— Un instant…
Elle quitta son siège, s’approcha de moi, m’agrippa le
bras, et me submergeant d’un parfum auquel se mêlait
son odeur :
— … J’étais pressée, je voulais récupérer ces bijoux
avant le retour de mon mari qui est actuellement en
voyage d’affaires. Je ne voulais pas qu’il s’aperçoive… Il