Pas de bavards à la Muette

— Je vais vous expliquer. Ces belles madames, comme
vous dites, me semblent extrêmement vulnérables. Il doit
être facile d’exercer un chantage permanent sur elles,
voire leur faucher leurs bijoux sans qu’elles protestent
trop…
Je développai ma pensée, brisant le morceau sans
ménagement sur la possibilité d’un gang organisé, etc.
M. René ne se troubla pas et ce fut même avec un
indéniable accent de sincérité qu’il dit :
— Je vois ce que vous voulez dire, monsieur, mais je
puis vous garantir que rien de semblable n’existe. Ces
jeunes gens jouissent d’avantages appréciables. On peut
critiquer leur mentalité, mais ils sont honnêtes. Il n’est
pas de leur intérêt…
Et il me servit quelques arguments assez convaincants.
— Possible, grommelai-je. N’empêche que Bénech a
barboté les bijoux de Mme Ailot.
— Ah ! Ah !
— Ça n’a pas l’air de vous étonner. Pour un type qui
vient de me prouver par neuf la pureté de ces
messieurs…
— Permettez, monsieur. Plus rien de ce que vous me
direz sur Bénech ne pourra m’étonner. Je n’aurais pas cru
que ce Breton soit si décevant. Mais il faut se rendre à
l’évidence et il est possible qu’il se soit rendu coupable
d’un larcin. Je n’en sais rien, mais nous avons la preuve
qu’il prenait parfois de scabreuses initiatives personnelles,
n’est-ce pas ?
— Une brebis galeuse, alors ?
— Oui, monsieur.