Pas de bavards à la Muette

pas sur elle. La blonde était pourtant assez capiteuse,
mais Yves Bénech avait peut-être, maintenant, d’autres
préoccupations.
Parvenu au bas des soixante-quinze marches, il
traversa sous le viaduc tout grondant du passage d’une
rame. Je restai sur mon trottoir, protégé par les énormes
piliers métalliques qui soutiennent l’ouvrage.
Je vis mon bonhomme s’immobiliser, consulter une
nouvelle fois son calepin, rectifier l’ordonnance de sa
cravate et, repartant du pied gauche, se diriger vers une
des maisons à l’aspect sévère et cossu qui s’élèvent là, les
fenêtres du deuxième étage au niveau de la voie ferrée. Il
sonna à une porte, parlementa plus ou moins avec la
personne qui vint lui ouvrir et disparut dans l’immeuble.
Je poursuivis mon chemin, notai en passant le numéro
de l’immeuble, descendis jusqu’à l’autre escalier, celui qui
débouche sur le quai, et entrai au tabac qui fait juste le
coin, à gauche. C’était une affaire qui débutait bien, rayon
bistrot, et au cours de laquelle, si ça continuait comme ça,
je ne risquais pas de mourir de soif. Je ne sortais d’un café
que pour entrer dans un autre. Pour le prix d’un verre, je
feuilletai un annuaire téléphonique par rue et constatai
que rue de l’Alboni, au numéro qui m’intéressait,
demeuraient un baron et une baronne d’Aurimont. Une
future cliente pour mézigue, peut-être. Je remis
l’annuaire en place et séchai mon apéritif. Pour le
moment, ces tuyaux me suffisaient. Je ne les recueillais,
d’ailleurs, qu’à titre purement informatif. Je quittai le
bistrot. Sur le trottoir, un type qui voulait traverser
l’avenue de New York pour aller vers le pont de Passy,