Pas de bavards à la Muette

moins que… Je restai sur ma chaise. Il me dominait de
toute sa taille :
— Écoute, papa, dit-il, le gros chauve, comme tu dis, sa
combine ne regarde personne. C’est peut-être un peu
spécial, mais sans être légal, ça n’est pas illégal. De plus, il
se cogne pas mal de pauvres mecs dans ton genre, et il
t’emmerde.
— Ça fait un de plus. Je les collectionne. Continue.
— Moi…
— Tu m’emmerdes aussi. Pour la deuxième fois en
quelques minutes. Y a pas d’offense.
— Ta gueule ! gronda-t-il, exaspéré. Nom de Dieu ! dis
ce que tu as sur le cœur et casse-toi. Les flics officiels ne
valent pas cher, mais les flics privés, alors, parlons-en.
Pas délicats sur le choix des moyens pour se procurer
leurs minables sandwiches rassis, hein ? Mais avec
mézigue, rien à chiquer, je t’avertis tout de suite. Si je
couche avec mes patronnes, ce sont les oignons de
personne, et si tu veux me faire chanter, tu t’es gouré de
porte.
— Ça va. Nous nous emballons comme deux
cornichons, dis-je, calmement. Je m’en balance, moi, que
tu couches avec tes patronnes. Tu peux même coucher
avec tes patrons, si ça t’amuse. Tout ce que je t’ai boni,
c’était pour que tu te rendes compte que je n’étais pas le
premier venu, c’est tout. Maintenant, nous allons parler
sérieusement. Qu’est-ce que tu dirais de cent sacs ? Cent
beaux sacs à tézigue ?
— Cent sacs ?
— Pour faire le jeune homme.