Pas de bavards à la Muette

egard légèrement goguenard du veilleur insomnieux, que
mon chapeau paraissait fasciner, et montai chez moi.
Je me couchai, après avoir constaté avec surprise qu’il
n’était pas plus de minuit dix. Le temps m’avait paru plus
long.
À minuit et demi, je ne dormais pas encore. Allongé
entre deux draps propres, je ne me sentais pas plus à
l’aise que précédemment sur mon escalier. Des douleurs
parcouraient mes côtelettes. Et peut-être aussi que –
intention bien légitime – j’attendais le retour de mon
acrobate, pour lui dire deux mots. À une heure, je ne
dormais toujours pas et aucun bruit ne m’était parvenu
du couloir. Aucun bruit ne parvenait de nulle part.
Intérieur et extérieur étaient le domaine du silence. Pour
me faire mentir – comme si j’avais besoin de ça –, une
quelconque horloge du voisinage égrena le quart d’une
heure. Mais ça ne fit que rendre plus sensible le silence,
lorsque tout y retomba. Je bâillai dans le noir, cherchai
ma pipe à tâtons, l’allumai et ne fis qu’aggraver ma gueule
de bois. Quant aux courbatures, elles persistaient. Je fis la
lumière et me rhabillai, après avoir brossé mon costard,
qui se ressentait autant que le chapeau de son contact
avec l’escalier. Une affaire de tout repos, dans un quartier
tranquille et bourgeois ! J’ouvris la porte de ma chambre,
inspectai le couloir, l’oreille dressée. Rien pour la vue ;
rien pour l’ouïe. Je pris mon passe et, marchant sur mes
chaussettes, m’en fus re-visiter la carrée de Célestin. Elle
était vide, c’est-à-dire que son occupant n’était toujours
pas rentré. À part ça, aucun changement dans le décor.
Les timbales et la bouteille carrée de gin étaient là où je