Pas de bavards à la Muette

— C’est de ça qu’il est mort ?
— Non. Je crois qu’il serait mort de toute façon. Sa
mort n’a rien à voir avec les bijoux. Le drame de la rue
Berton, c’est un supplément au programme, un truc fait
sur mesure pour moi, si j’ose dire, mais indépendant.
Elle sourit :
— Un présent des dieux, je vous l’ai déjà fait observer.
— Oui, quelque chose comme ça. Dans chacune de mes
enquêtes, les plus banales, les plus simples, il faut toujours
que s’insère un épisode extraordinaire et spectaculaire,
surtout si je dois être aux premières loges, selon mon
habitude…
En prononçant ces paroles, un bizarre sentiment me
submergea. Je me remémorai mon rêve et ce fut comme
si, brusquement, je nageais dans une atmosphère
onirique. La voix d’Hélène me parvint, lointaine :
— Et alors, patron, vous rêvez ?
Je me secouai.
— Exactement. Et je ne sais à quoi ! Ce doit être ce
soleil, la digestion et ce que j’ai bu au repas. On dirait que
j’éprouve le besoin de faire la sieste.
— On ferait peut-être aussi bien de stopper sur le bascôté
d’une allée, alors. Ce serait toujours mieux que
d’entrer dans un arbre. Ce qui nous pend au nez si vous
continuez à rêvasser. Et si nous avions un accident, c’est
pour le coup que nous serions aux premières loges.
Je plongeai mon regard au plus profond de ses jolis
yeux.
— N’est-ce pas, chérie ? Je suis toujours aux premières
loges, hein ?