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Pas de bavards à la Muette

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Ce n’était peut-être pas tout <strong>à</strong> fait l’heure <strong>de</strong> l’apéritif,<br />

mais j’en buvais un, <strong>à</strong> <strong>la</strong> terrasse du tabac qui fait le coin<br />

<strong>de</strong> l’avenue d’Ey<strong>la</strong>u, p<strong>la</strong>ce du Trocadéro, et mon regard<br />

avait le choix entre <strong>la</strong> tour Eiffel, qui surgissait tel un<br />

poignard dirigé vers le ciel, au-<strong>de</strong>l<strong>à</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> terrasse <strong>de</strong><br />

Chaillot, le monument élevé <strong>à</strong> <strong>la</strong> gloire <strong>de</strong> l’Armée<br />

Française, contre le mur du cimetière <strong>de</strong> <strong>Pas</strong>sy –<br />

monument portant hautement atteinte au moral <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

Nation, si on veut mon avis –, et le mât-totem ramené <strong>de</strong><br />

Colombie-Britannique par Kurt Seligman, un artiste que<br />

j’ai connu, jadis, et qui accueille – le totem, pas Seligman –<br />

les visiteurs au seuil du Musée <strong>de</strong> l’Homme. Mon regard<br />

avait le choix, mais mon regard se portait plus loin que ça.<br />

Il al<strong>la</strong>it sur le cadavre <strong>de</strong> Lasserre, chevaleresque gouape<br />

<strong>à</strong> qui on avait cloué le bec. Il plongeait même plus loin<br />

encore.<br />

J’avais <strong>à</strong> peine eu le temps d’i<strong>de</strong>ntifier le macchabée<br />

que, <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième course étant terminée, le flot <strong>de</strong>s<br />

occupants <strong>de</strong>s tribunes avait déferlé dans l’escalier.<br />

J’avais profité <strong>de</strong> <strong>la</strong> confusion qui s’était emparée <strong>de</strong> tout<br />

le mon<strong>de</strong>, pour mettre les voiles. Et j’étais venu me<br />

réfugier dans ce café du Trocadéro où personne ne me<br />

connaissait, pour réfléchir <strong>à</strong> <strong>la</strong> portée <strong>de</strong> tous ces<br />

événements. Et j’avais téléphoné <strong>à</strong> Hélène, lui <strong>de</strong>mandant<br />

<strong>de</strong> venir me rejoindre, en compagnie <strong>de</strong> Zavatter. Je les<br />

attendais.<br />

Ils rappliquèrent vers sept heures. Les <strong>de</strong>rnières<br />

éditions <strong>de</strong>s journaux du soir re<strong>la</strong>taient ce qu’on appe<strong>la</strong>it<br />

le drame <strong>de</strong> l’hippodrome. Je mis mes col<strong>la</strong>borateurs au<br />

courant.

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