Pas de bavards à la Muette

ne devait rentrer que dans une semaine. Mais après…
après ce qui s’est passé, il m’a bien fallu lui télégraphier. Il
sera là demain ou après-demain. C’est un homme affreux,
un épouvantable tyran. Souvenez-vous de ce que je vous
dis, monsieur Nestor Burma. Si jamais il m’arrivait
malheur…
— Il ne saura rien par moi, madame, la rassurai-je. (Ça
m’aurait étonné qu’il ne soit pas au courant, mais ça,
c’était ses oignons.) Je ne vous ai posé cette question que
pour mon édification personnelle. Il ne saura rien par moi.
Et si vous pouvez lui cacher pendant quelques jours la
disparition de vos bijoux, peut-être serai-je assez heureux
pour les récupérer avant que ça devienne dangereux. Je
vais essayer de faire vite. Je vous dois bien ça. Je ne vous
ai pas été d’un grand secours, jusqu’ici. Je n’ai réussi qu’à
assister au nettoyage du chauffeur par votre nièce. Ce
n’est pas ce que j’appelle rendre service ni gagner
honnêtement mon beefsteak.
Je lui laissai la broche. Si elle voulait s’amuser avec…
*
* *
Six heures venaient de sonner. Dix-huit heures, en
dialecte d’horloge parlante. Apéro, en langage civilisé. Je
m’en fus me taper un Cinzano là où je comptais tomber
sur un autre zèbre : le gros chauve du bistrot de la
Chaussée de La Muette ; le tenancier du bureau de
placement et syndicat résolument apolitique. Le début de
piste dont j’avais parlé à Mme Ailot, c’était le gros chauve.
Malheureusement – soit qu’il fût en fuite, soit tout autre
motif –, je ne trouvai pas le gros chauve au bistrot et les