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Pas de bavards à la Muette

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CHAPITRE II<br />

LE CHAUFFEUR FAIT DES SIENNES<br />

Il fit brusquement sombre, vers neuf heures. Ç’avait<br />

été une belle journée printanière, une journée comme on<br />

n’en avait pas connu <strong>de</strong>puis longtemps, mais, justement,<br />

c’était trop beau pour que ça dure. Avec <strong>la</strong> nuit qui venait,<br />

<strong>de</strong>s nuages noirs envahirent le ciel, accélérant l’obscurité<br />

naissante. La pipe au bec, je lisais <strong>la</strong> presse vespérale,<br />

allongé sur le plumard, <strong>la</strong> <strong>la</strong>mpe <strong>de</strong> chevet allumée. Par <strong>la</strong><br />

fenêtre ouverte, <strong>de</strong> rares bruits me parvenaient.<br />

Quelques mesures musicales, sortant d’un appareil <strong>de</strong><br />

radio et apportées par <strong>la</strong> brise, glissaient jusqu’<strong>à</strong> moi sans<br />

me faire grand mal. Les autos qui circu<strong>la</strong>ient passaient en<br />

un froissement rapi<strong>de</strong>. À intervalles irréguliers, un<br />

grincement métallique s’élevait du chantier <strong>de</strong><br />

construction déserté : l’immense bras <strong>de</strong> <strong>la</strong> grue que le<br />

vent <strong>de</strong>vait pousser. Si je n’avais pas attendu <strong>la</strong> visite<br />

d’Yves Bénech, je me serais endormi, tellement je me<br />

sentais mou. Mais j’attendais Yves Bénech. Il s’annonça <strong>à</strong><br />

dix heures, alors que, sans raison va<strong>la</strong>ble, je ne comptais<br />

plus sur lui. Comme il frappait <strong>à</strong> <strong>la</strong> porte, une averse<br />

creva. Autrement dit, il rentrait <strong>à</strong> temps pour ne pas<br />

abîmer son beau feutre gris.<br />

— Bonsoir, dit-il, lorsque je lui eus ouvert. C’est vous,<br />

le copain dont m’a parlé Joséphine ?<br />

— Elle s’appelle Joséphine ?<br />

— Oui. M’sieu Dalor, je crois ?

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