Pas de bavards à la Muette

premier coup de feu, André l’a fait disparaître. Deuxième
coup de feu (le premier que j’entends) :
voici la balle et la douille sera sur le tapis. Cette balle
vous a échappé parce que, vous croyant, comme tout le
monde, devant un truc sans bavures, vous n’avez peutêtre
pas procédé à une fouille très complète. Troisième
coup de feu (le second que j’entends, et que je fais même
plus qu’entendre) ; et non prévu au programme : point
d’impact dans le chambranle de la porte… Mon
témoignage, donc, est désormais acquis. Et je me suis,
comme toujours, trouvé aux premières loges. Mais des
doutes m’assaillent, m’assailliront souvent. Cette fois, j’ai
été vraiment trop aux premières loges. Ce n’est ni normal
ni naturel. Je sens confusément que j’ai assisté à un
spectacle préparé à mon intention. Mais, pour le moment,
mes doutes ne vont pas loin. Plus tard, toutefois, à la lueur
d’autres détails, ça m’incitera à envisager des hypothèses.
Bon. Alors, ici, grande scène dramatique. Mme Ailot pique
une crise de nerfs non simulée, je vous prie de le croire.
Évidemment, elle joue gros. Nous rentrons tous rue du
Ranelagh où, en comédienne consommée, elle fait
semblant de vouloir me corrompre, en souhaitant que je
ne marche pas. Je ne marche pas. Mais je suis embêté de
ce qui arrive à Suzanne. Que faire d’autre, pourtant, que
de vous informer du drame ? Vous arrêtez Suzanne ; elle
ne vous est pas très utile ; avoue néanmoins être la
maîtresse du chauffeur (ce qui est faux) parce que ça la
flatte… ça la pose… etc. Et surtout, elle continue à ne plus
savoir très bien ce qu’elle dit et ce qu’elle fait. Si elle n’est
pas crevée de la dose de drogue qu’ils lui ont filée, c’est