Pas de bavards à la Muette

épondre franchement. Si vous en êtes capable.
— Elle m’a tiré dessus.
— Merci.
— Partez pas, dis-je. Je viens de lire les canards. Alors,
elle a avoué ?
— Ça vous étonne ?
— Non, mais je voudrais des détails. La presse n’en
fournit pas des masses.
— Écoutez, soupira-t-il, vous qui me procurez toujours
du boulot, vous ne connaîtriez pas un dur, un coriace
particulièrement méchant, un tueur ou marchand de
viande quelconque, sur lequel je puisse passer mes nerfs ?
Un mec qui essaie de me répondre ; un costaud qui soit de
taille à me répondre, même ; voilà ce que je désire. Il y a
des fois où mon métier me débecte. Travailler sur une
gamine comme cette Suzanne, ce n’est pas réjouissant, je
vous le dis.
— Elle a été si pénible que ça ?
— Ne faites donc pas celui qui ne comprend pas.
— Je comprendrais mieux si vous me racontiez.
Rendu bavard par l’irritation, il me fit un récit assez
différent de celui des journaux. Suzanne avait avoué, sans
avouer, tout en avouant. Faroux la plaignait plutôt, cette
môme, mais que voulait-on qu’il fasse ? Ça n’avait pas été
marrant, il me le garantissait. Il ne savait pas si elle avait
pris elle-même la drogue dont elle était farcie, ou si on la
lui avait administrée de force, mais il était surprenant
qu’elle n’en soit pas crevée. En tout cas, elle était encore
sous l’effet de cette saloperie et pendant que les flics
l’interrogeaient, des fois elle était avec eux, l’instant