Pas de bavards à la Muette

… Cependant qu’une seconde détonation saluait
joyeusement mon irruption.
Une table massive, une commode basse, un divan,
deux fauteuils fantomatiques sous leurs housses et une
chaise renversée, constituaient l’ameublement du lieu.
D’épais rideaux de velours cramoisi, d’une infime
tristesse, masquaient les fenêtres. Un autre rideau, à
moitié tiré sur sa tringle, pendait devant une porte de
communication. L’atmosphère empestait le vieux mégot
et un peu la cordite. Deux êtres de sexe complémentaire
occupaient l’endroit. L’homme étendu sur le tapis
bousculé, dans le désordre de son imperméable, ne
paraissait pas plus nerveux que le galurin gris qui avait
roulé à ses côtés. Moins, même. Beaucoup moins. Le
chapeau pourrait resservir, tandis que le type… La fille se
tenait devant le rideau du fond, sa petite menotte aux
ongles rongés armée d’un revolver fumant. Dans son
visage épouvanté, ses yeux marron, écarquillés,
semblaient regarder sans voir, mais ce n’était sans doute
qu’une impression, car j’avais bel et bien failli stopper une
dragée.
Planquant mon propre engin, je bondis par-dessus le
cadavre de Célestin et attrapai le bras nu de la môme. Elle
se débattit sans un mot, un simple râle plaintif fusant
d’entre ses lèvres exsangues. Je lui assénai un
ramponneau, lui tordis le poignet. Elle lâcha le pistolet.
Moi, je ne la lâchai pas. Je continuai à la secouer, après
avoir catapulté le revolver loin de nous.
Il se passa alors quelque chose d’inattendu, en
admettant que je m’attende jamais à quelque chose qui ne