Pas de bavards à la Muette

oniment de chauffeur en quête d’embauche.
— Je ne sais pas si je pourrai vous être utile, dit-il. En
attendant, on va toujours boire un coup.
Il fit le service, ne lésinant pas sur la camelote, s’assit
sur le plumard et leva son godet vers le plafonnier
éclairé :
— À la vôtre.
— À la vôtre, Célestin.
Et je bus. Lui ne but pas. Il resta la timbale en l’air et
fronça les sourcils. La pluie tambourinait contre les volets
de bois.
— Merde, dit le chauffeur.
Il trempa ses lèvres dans le gin, puis :
— … Je ne m’appelle pas Célestin.
— Moi, je ne m’appelle pas Dalor. Nous sommes
quittes.
— Quittes ? Tu parles ! Qu’est-ce que c’est que ce
turbin ? Pour un type qui débarque de province…
— Ne me faites pas rigoler. La province ? Ça fait bien
dix piges que je ne suis pas allé plus loin que Châtillonsous-Bagneux.
Alors, vous voyez, en fait de province…
Vous allez comprendre…
J’avalai une gorgée et reposai ma timbale :
— … Fameux, ce gin. C’est Mme Ailot qui le fournit ?
On ne dirait pas, à la voir, qu’elle apprécie ce genre de
tisane…
Il resta muet. Je lui colloquai une de mes cartes, une de
celles qui avouent tout. Il la lut et relut, avant de pouvoir
articuler :
— Flic privé ?