Pas de bavards à la Muette

des rues de l’Assomption et de Boulainvilliers, brillait de
mille feux. Il en émanait des flots d’harmonie débités par
le bastringue à jetons et le tintement caractéristique des
billards électriques en plein boum. Sur le trottoir,
quelques jeunes gens, mâles et femelles, se racontaient
des trucs qui les faisaient rire – ce genre de trucs
printaniers qui font rire avant qu’ils ne fassent pleurer.
L’hôtelier me montra le garage. Une remise au fond d’une
cour intérieure à laquelle on accédait par un passage entre
sa maison et une autre. Nous revînmes sur le trottoir,
nous heurtant presque à un type qui faisait les cent pas,
dans l’attente de l’autobus 52.
— Le passage reste ouvert, mais la porte de la remise
est solide, m’sieu Burma, fit le gros Champloit. Et votre
voiture sera toujours aussi bien là que dehors, n’est-ce
pas ?
— Oui. Je vais aller la chercher. Je l’ai laissée rue
Berton…
Je l’avais rangée là, au pied de l’escalier, avant de
perquisitionner dans le pavillon, et ne l’avais plus touchée
depuis. Du garage de l’avenue de New York, d’où j’avais
téléphoné à Faroux, j’étais allé à pied au quart de la rue
Bois-le-Vent, parce que je voulais réfléchir et que le
réfléchis mieux en remuant les jambes, même si elles sont
fatiguées. Ensuite, je m’étais propulsé à bord de la tinette
des flics.
— … J’espère qu’on ne me l’a pas fauchée.
— Fauchée ? En voilà, une idée ! C’est un quartier
tranquille, ici.
— Je finirai par le croire, ricanai-je.