Tom. V - Archive ouverte UNIGE

575 ACTES DE RATISBONNE. 576
Apostres il y eust des Docteurs par toutes les Eglises,
ayant la charge de prescher l'Evangile, lesquelz
il suscite, n'estans pas semblables du tout aux
Apostres en dons, neantmoins ayant un mesme office.
L'unité donc de l'Eglise consiste en telle conionction,
soubz un chef qui est Christ, par un mesme
Evangile et un mesme ministère, auquel on doit
obéissance: comme il diet: Qui vous escoute, il m'escoute
: affin que par ce moyen soit entretenue l'unité
de la foy, l'usage conforme des Sacremens et la discipline
commandée en l'Evangile. Car les Pasteurs ont
mandement de Christ non seulement de prescher l'Evangile
et administrer les Sacremens, mais aussi de
punir les rebelles par excommunication: à sçavoir
ceux qui sèment faulses opinions contre la saine doctrine,
ou ne se veulent point corriger de leur mauvaise
vie. Car de droict divin on doit obéir aux
Pasteurs en telle discipline. Or affin que toutes choses
se fissent par ordre en l'Eglise, selon lareigle
de S. Paul (l Cor. 14, 40): que les Pasteurs fussent
mieux conioinetz ensemble: affin aussi qu'ilz peussent
partir [fol. 76] leurs charges, et que les uns
eussent le soing des aultres: ainsi que toutes divisions
fussent évitées: on a faict puis après une ordonnance
utile, que d'entre tous les Prestres d'une
Eglise, il y en*eust un esleu Evesque, pour gouverner
l'Eglise en preschant l'Evangile et tenant
le peuple en obéissance, et aussi pour avoir superintendence
sur les aultres prestres. Depuis on a faict
encores d'aultres degrez, comme des Archevesques, et
par dessus iceux des Patriarches: lesquelz estoyent,
l'Evesque de Rome, d'Antioche, et d'Allexandrie.
Telles ordonnances sont utiles à conserver l'unité
de l'Eglise, si ceux qui sont en telle preeminence font
leur devoir: à sçavoir en assemblant les Synodes,
pour iuger deuement de la doctrine, pour corriger
les vices publiques, comme usure et aultres: pour
faire bonnes ordonnances: pour punir les autheurs
de scandales. Cela s'entend tousiours, si les Prelatz
servent à leur vocation enseignant, faisant visitation
pour sçavoir quelle doctrine on enseigne en
leurs Eveschez et quelles sont les meurs du peuple,
en corrigeant les mauvaises opinions et les vices,
exerceant iurisdiction spirituelle. Car nous ne pouvons
concéder nulle authorité aux Prelatz, qui répugnent
à la saine doctrine: comme il est escript
aux Gralatiens: Si quelqu'un vous annonce etc.
Au reste quand au gouvernement Ecclésiastique,
il fault laisser puissance aux Evesques, de faire
ordonnances à ce, que tout se face en l'Eglise honnestement,
et avec bon ordre: comme de constituer
des festes, affin que le peuple sçache, quand il se
devra assembler. Item, qu'on vienne sobre à l'Eglise.
Mais il ne fault pas qu'on pense que telles traditions
soyent services de Dieu, c'est à dire, méri­
tes ou bonnes oeuvres, desquelles la fin directe ou
immediate soit de faire honneur à Dieu. Car il est
escript: En vain on honnore Dieu par traditions
des hommes. Secondement il ne fault pas quelles
contreviennent au commandement de Dieu, ne qu'on
les estime choses nécessaires: mais les fault tenir
pour indifferentes, lesquelles il est loisible de omettre
hors le scandale. Comme sainct Paul aux Collosiens
le diet, [fol. 77] parlant des ordonnances humaines
qui se font en l'Eglise: que nul ne vous condemne
en viande, ne breuvage, ne iour de feste.
Car il est besoing de discerner entre les traditions
humaines, et la droicte reigle de servir à Dieu, qui
l'a institué luy mesme. Comme il est diet en Ezechiel:
le suis le Seigneur vostre Dieu: cheminez en
mes commandemens.
Des Sainctz. ')
Nous ne recevons pas ce poinct du present article,
où il est parlé de la double invocation des
Sainctz, qui sont décédez de ce monde. C'est que
à cause de leurs mérites nous soyons aydez. Item
qu'on les invoque directement, comme en disant:
S. Pierre, prie pour moy. Car Christ diet : Tout ce
qu*e vous demanderez au Père en mon Nom, il
vous sera donné. Certes il y a un seul Mediateur,
qui nous a esté donné, et avons commandement de
nous adresser à luy, comme il diet: Tenez à moy
vous tous, qui estes chargez et travaillez: et ie vous
soulageray (Matth. 11, 28).
Parquoy la façon de prier par aultres médiateurs,
n'est point à approuver: principallement veu
que nul service de Dieu ne doit estre introduict
en l'Eglise qui ne soit approuvé par la parolle de luy
mesme.
Quand à l'invocation directe de celuy qui est
absent, elle attribue toute puissance à celuy qui est
invoqué. Car de oyr les désirs des cœurs, il appertient
à un seul Dieu. Et combien - qu'on ayt
cherché une subtilité, pour excuser ceste absurdité,
toutesfoys elle n'a tesmoignage de la parolle de Dieu:
et est contraire à l'affection et pensée de ceux qui
font telles oraisons, lesquelz ont leur refuge aux
Sainctz, pource qu'ilz estiment, que Dieu est courroucé:
et ainsi veulent que les prières soyent portées
à Dieu par les Sainctz.
Finablement, puis qu'il est tresmanifeste, que
de tel honneur qu'on porte aux Sainctz, l'office du
Mediateur, Iesus Christ est obscurcy, nous ne lé
pouvons nullement confermer par nostre approbation.
1) Lettre F. Voyez ci-dessus page 549.