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591 ACTES DE RATISBONNE. 592
iustifié par foy, avec les oeuvres. Oar aucuns * de la
partie adverse sont en ceste fantasie, qu'il fault
ainsi prendre la sentence de sainct Paul, quand il
diet: Nous sommes iustifiez par foy. Comme s'il
disoit: nous sommes préparez à iustice, c'est à dire
à diloction, pour laquelle nous sommes puis après
aggreables à Dieu, non pas par foy à cause de Christ.
Or si l'article estoit dépravé en telle sorte, nous
serions contrainetz de contredire. Car noz députez,
quand ilz ont diet, foy vive ou efficace, ontvoulu
signifier, qu'ilz ne parloyent point de la seule
congnoissance de l'hystoire, telle que l'ont les infidèles:
mais de la fiance, qui receoit la miséricorde
promise à cause de Christ, et qui console les consciences
espoventées.
En ce sens les nostres ont parlé de l'efficace
de foy, par laquelle icelle foy est un mouvement
ardent, et confortant, s'appuyant en Christ et vivifiant:
comme il est demonstré consequemment en
l'article: et le Prophète dit, que le iuste vivra de
sa foy.
Pourtant, affin que la locution ambiguë ne nous
engendre des debatz, ou il fault adiouster ceste declaration,
ou oster ce mot efficace. Ce que nous
avons tel soucy de ce passage, la raison est, pource
qu'en ceste ville, mesme après la conference, on a
publié quelques propositions: lesquelles condamnent
appertement nostre doctrine, qui est neantmoins la
pure vérité de l'Evangile, et remettent en avant la
persuasion vulgaire, que par la seule dilection nous
sommes aggreables à Dieu. Et qu'est cela à dire
aultre chose, sinon que l'homme plaist à Dieu, non
point à cause de Christ, mais à cause de ses vertuz,
ou œuvres? Et les mesmes propositions re-'
nouvellent beaucoup d'erreurs repugnans à l'Evangile.
Si plusieurs en la partie adverse persistent
à maintenir en opiniastreté leurs faulses persuasions,
quelle espérance pourra [fol. 96] on avoir de tranquilité
ou accord?
En la seconde partie du mesme article de la
iustification, il sera besoing d'expliquer plus amplement
la doctrine des bonnes œuvres. Car puis
qu'il avoit esté diet au paravant qu'il y a tousiours
quelques relicques de péchez auxSainctz: puis aussi,
qu'il fault clairement enseigner, que les régénérez
iamais ne satisfont, ceste vie durant, à la loy de
Dieu: les âmes fidèles cherchent comment elles
pourront plaire à Dieu, veu qu'elles sont entachées
ae péché, et ne satisfont point encores à la loy.
Ceste doubte tormente tousiours les bonnes
consciences: et voyons, que la question en a esté
traictée diligemment par les sainetz Docteurs Ecclesiasticques,
à sçavoir, Basille, Hierome, Augustin
et Bernard. H fault doneques icy taxer l'arrogance
et hypocrisie de ceux lesquelz ignorantz la doctrine
de la foy en Christ, se prisent eulxmesmes, et pen­
sent leur propre pureté ou perfection, estre de valeur
suffisante pour obtenir vie éternelle.
Au contraire, le Pseaulme diet: Nul vivant ne
sera iustifié devant toy. Item: Si tu prends garde
aux iniquitez, Seigneur, qui est ce qui consistera?
Item: le pèche seulement contre toy, affin que tu
sois iustifié en tes parolles et soys vainqueur quand
on te condamne.
D'aultrepart, il fault consoler les fidèles, à ce
qu'ilz se tiennent pour certains, premièrement que
leurs personnes plaisent à Dieu en Christ par foy,
non pas d'autant qu'ilz satisfont à la loy de Dieu,
pareillement que ceste obeyssance imperfaicte, laquelle
doit suyvre, est aussi plaisante, quand avec
desplaisir ilz recongnoissent leur imperfection, et
toutesfoys croyent que leur obeyssance. est agréable
par Christ, et leurs œuvres sont présentées comme
hosties spirituelles, ainsi que diet sainct Pierre:
Offrez hosties spirituelles à Dieu agréables par
Christ. Qu'ilz ayent aussi ceste certitude, que non
pas d'autant qu'ilz satisfont à la loy, mais à cause
de Christ, après qu'ilz sont iustifiez par foy et faietz
héritiers, la vie éternelle leur est [fol. 97] donnée:
selon ceste sentence : C'est la volunté du Père, que
quiconque croira au Pilz, ayt la vie éternelle.
Et pource qu'il y demeure tousiours quelques
reliques de péchez aux Sainetz, il fault mettre difference
entre les péchez, pour lesquelz la grace n'est
point ostée: et les aultres qui estaignent la grace,
et le sainct Esprit. Il sera bon d'adiouster cela
pour plusieurs et bonnes causes. Car de cela les
fidèles entendent que la foy ne signifie pas seulement
intelligence de la doctrine, mais fiance en la
miséricorde de Dieu, à nous promise à cause de
Christ, laquelle fiance ne consiste point avec mauvaise
conscience. Secondement, ilz entendent que
ceulx qui persévèrent de trébucher contre leurs consciences
ne peuvent invoquer Dieu, veu qu'on ne
le peult invoquer sinon en fiance du Mediateur Iesus
Christ. Tiercement ilz entendent que ceste foy
ou fiance, pareillement le sainct Esprit, ne peuvent
estre en ceulx qui pèchent contre leurs consciences.
Nous estimons que les députez de l'aultre part
et tous hommes prudens et craignans Dieu, approuveront
nostre conseil, de mettre ces additions.
Au tiltre de la marque de l'Eglise, à sçavoir
de la parolle de Dieu, il y a une cottatipn adioustée
sur le passage, où il est diet, ceste grand'maison
a promesse de la presence du sainct Esprit.
Les nostres ont diet, que ceste promesse appartenoit
aux fidèles et esleuz, non pas à la multitude
des meschans, auxquelz appartiennent les menasses.
Pourtant il fauldroit obmettre ces motz, grande maison.
Car il ne fault pas confermer ceste opinion
que la multitude des meschans ne puisse errer à
cause des promesses données à l'Eglise, veu que