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659 ACTES DB RATISBONNE. 660<br />
honneur et quasi aneanty: car il ne luy en est<br />
quasi demeuré que le nom. Les graces lesquelles<br />
nous devions recevoir de luy sont effacées de la<br />
memoire des hommes: on ne sçait que c'est de<br />
vraye foy ne de vraye penitence, où consiste toute<br />
la somme de l'Evangile. Les paovres consciences<br />
sont oppressées de constitutions perverses et tyranniques<br />
et sont détenues comme en des géhennes<br />
horribles par les liens qu'on leur a mis sus contre<br />
la parolle de Dieu: il [fol. 177] n'y a nulle partie<br />
de la Religion qui ne soit corrompue, par opinions<br />
supersticieuses et mauvaises : l'usage des Sacremens<br />
est renversé tout au rebours: -le Sacrement de la<br />
saincte table de nostre Seigneur est du tout<br />
prophané et deshonnoré, car au lieu de la communion,<br />
qu'on devroit faire, on a dressé une manière<br />
de sacrifice du tout contraire à la mort de IeBus<br />
Christ. Les Messes sont en ventes à qui les veult<br />
achepter et non seulement la marchandise est en<br />
cest endroict, mais tout ce que nostre Seigneur a<br />
institué pour le salut de son Eglise est mis en foire.<br />
Les Pasteurs ne pensent pas que cela appartienne<br />
à leur office d'endoctriner le peuple: ainsi toute lumière<br />
de vérité est presque esteincte, qu'à grand<br />
peine en est il demeuré quelques estincelles, et la<br />
pluspart du monde est plongé en horribles ténèbres:<br />
dont s'ensuyvent tant de scandales, qui tous<br />
les iours adviennent. La discipline, tant du clergé<br />
que du peuple, est abolie: brief tout est en merveilleuse<br />
confusion. Pour commencer à remettre<br />
l'Eglise au dessus, laquelle est si misérablement de 1 -<br />
solée, il failloit venir à ceste racine, et non pas<br />
chercher des petites feuilles comme faict monsieur<br />
le Legat, qui s'amuse seulement à la cuysine, au<br />
buffet, à la garderobe et à Testable des Evesques.<br />
Voila comme la court Romaine se veult acquiter<br />
de la reformation des Eglises. le dictz seulement<br />
iusques à donner quelques bonnes parolles: car de<br />
l'effect, il n'en est nouvelle: et qu'ainsi soit,.qu'on<br />
regarde quel amendement il y a eu entre eulx depuis<br />
vingt ans en ça qu'on ne cesse de crier contre<br />
leur meschante vie.<br />
Or pource que le Legat avoit taxé la doctrine<br />
des protestans: les prescheurs et docteurs qui<br />
estoyent là presens, furent d'advis de luy faire<br />
quelque response, seulement pour luy remonstrer,<br />
qu'il ne devoit pas vitupérer contre sa conscience,<br />
ce qu'il ne pouvoit reprouver par raison, ne par<br />
tesmoignage de la parolle de Dieu: laquelle response<br />
fust composée par Philippe Melancthon: mais<br />
présentée au nom de tous, comme il s'ensuit.<br />
RESPONSE<br />
A CE QUI A ESTÉ MIS EN AVANT PAR LE CARDINAL<br />
CONTAREIN. »)<br />
[fol. 178] Ayant entendu que le Cardinal Contarein<br />
assisterait à ceste assemblée, nous avions<br />
bon espoir qu'il employeroit son authorité, non seulement<br />
pour constituer accord, ains pour illustrer<br />
et esclarcir la vérité. Car ceste noblesse de cœur<br />
et magnanimité est propre à un homme docte et<br />
sage, qu'il permette, que ce qu'il approuve, soit mis<br />
en avant, principalement en l'Eglise. Mais son iugement<br />
touchant le Livre et noz articles, lequel nous<br />
avons leu ces iours passez, ne respond point à nostre<br />
attente.<br />
Car par faulx preiudice nous sommes oultragez<br />
de luy, veu qu'il voit bien que nous n'avons<br />
aucune faulse opinion, et que nous ne tenons rien,<br />
qui répugne aux sains iugemens des gens sçavans<br />
et craignans Dieu, qui sont en l'Eglise de Christ:<br />
mesme qu'aucuns articles de la doctrine Chrestienne<br />
ont esté exposez en noz Eglises, et esclarciz bien<br />
chrestiennement et à proffit. Et toutesfoys il a mis<br />
en avant un iugement auquel il diet que nous desaccordons<br />
du commun consentement de l'Eglise. Il<br />
commande en l'aultre page que les Evesques veillent<br />
et taschent à destruire la doctrine que nous<br />
enseignons. Puis que telles choses ont esté proposées<br />
publiquement, nous ne les pourrions laisser<br />
passer, de paour qu'il ne semble que tacitement<br />
nous approuvons son iugement. Parquoy nous prions<br />
qu'on prenne en la bonne part ce que nous opposons<br />
et mettons au devant de sa reprehension iniuste,<br />
ceste responce vrayement et modestement<br />
escripte.<br />
Nous confessons bien que les nostres ont reprins<br />
plusieurs abuz, lesquelz par cy devant ont<br />
esté fort maintenuz en l'Eglise. Mais cestuy faict<br />
tort à l'Eglise de Christ s'il appelle ces abuz le<br />
consentement de l'Eglise catholique. Les traditions<br />
humaines espandues en l'Eglise contre l'Evangile,<br />
encor' qu'elles soyent [fol. 179] authorisées par grand<br />
espace de temps, et par les exemples de grandz<br />
personnages, et de la multitude: toutesfois elles ne<br />
sont point le consentement de l'Eglise catholique,<br />
qui consiste es escriptz des Prophètes et Apostres,<br />
et en ce qu'on congnoist par bons tesmoignages<br />
1) Voyez Bucer (Actes latins p. 143 et suiv., Actes allem,<br />
f. 152a); Mélanchthon (Opp. Witt. IV. p. 757 et seqq:\ Bret-<br />
Schneider (Corpus Bef. IV. p. 559 et seqq.). Le titre latin de<br />
ce mémoire est: „Responsio ad Censuram Contareni Cardinalis<br />
de Libro et articulis oppositis", et nous savons par Bucer<br />
et Calvin que Mélanchthon en est l'auteur. H fut remis au<br />
président du colloque, Frédéric, comte palatin, le 20 juillet.