A representação feminina nos lendários gaúcho e quebequense
A representação feminina nos lendários gaúcho e quebequense
A representação feminina nos lendários gaúcho e quebequense
You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
– La tuer! c'est aisé à dire, mademoiselle. N'importe, je ne vous ferai pas défaut;<br />
fut-elle la Madone même, je la hais pour sa bonté, comme vous, pour sa beauté... Tiens!<br />
encore une bourse comme celle-ci, et dans trois fois trois jours il y aura deuil au château de<br />
Beaumanoir, et personne ne saura comment est morte la concubine du chevalier Bigot.<br />
Angélique s'élança avec l'ardeur d'une panthère sur sa proie, et, poussant un cri de<br />
triomphe, elle serra la Corriveau dans ses bras et l'embrassa sur les joues.<br />
– Oui, c'est bien comme cela qu'il faut l'appeler, dit-elle, sa concubine! Sa femme, elle<br />
ne l'est point, elle ne le sera jamais! Merci! un million de fois merci! la Corriveau! si votre<br />
prédiction s'accomplit! Dans trois fois trois jours, à compter de ce moment, vous avez dit?<br />
La Corriveau ne tenait guère aux caresses et cherchait à se débarrasser; mais<br />
Angélique lui entoura le cou avec une de ses longues tresses blondes:<br />
– Tout à l'heure, je ne voulais pas vous permettre de toucher à mes cheveux, fit-elle,<br />
mais à présent je vous enchaîne avec, pour vous prouver que je vous aime et que je veux à<br />
jamais vous attacher à ma fortune!<br />
– Fi donc! votre amour! est-ce que j'en ai besoin, moi? gardez-le pour les hommes,<br />
répliqua la vieille malfaisante, en repoussant Angélique et en dépliant les boucles de la<br />
chevelure qui lui faisait un collier d'or.<br />
– Comprenez-moi bien, continua-t-elle, je vous sers pour de l'argent et non pour votre<br />
amitié; mais j'ai du plaisir quand même à faire peser ma main sur un monde qui me déteste et<br />
que je hais.<br />
Puis elle leva les deux mains en les recourbant, comme pour laisser dégoutter, du bout<br />
de ses doigts, le poison mortel.<br />
– La mort, reprit-elle, la mort tombe sur qui je veux la faire tomber. Elle tombe si<br />
mystérieusement, si subitement, que les esprits de l'air ne savent point d'où elle vient; l'aqua<br />
tofana ne laisse jamais de trace!<br />
davantage.<br />
Angélique écoutait avec terreur. Elle tremblait et cependant désirait en entendre<br />
– Quoi! la Corriveau, exclama-t-elle, vous possédez le secret de l'aqua tofana?... de<br />
l'aqua tofana que le monde croyait perdue avec les cendres de ses possesseurs, qui furent<br />
brûlés sur la place de Grève, il y a deux générations!<br />
– De pareils secrets ne se perdent jamais, reprit l'empoisonneuse, ils sont trop<br />
précieux. Peu d'hommes, encore moins de femmes refuseraient d'aller écouter aux portes de<br />
l'enfer pour les surprendre. Écrivez le secret de la confection de l'aqua tofana sur les lambris<br />
174