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A representação feminina nos lendários gaúcho e quebequense

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– Bah! les morts ne reviennent pas, murmura-t-elle. Et puis, si elle revenait, elle,<br />

cela me ferait une compagne de route.<br />

La misérable n'aurait peut-être pas eu peur, si l'image de sa pâle victime lui était<br />

apparue pour lui reprocher sa cruauté.<br />

La cloche du château sonna douze coups. Dans la forêt et les montagnes voisines, le<br />

son argentin se répercuta mélancoliquement.<br />

La Corriveau sortit du bois, longea la haie du côté de l'ombre et entra dans la tour.<br />

Elle se trouva dans une chambre carrée, obscure comme une caverne. Un rayon de<br />

lune, descendant par la fenêtre grillée, la traversait d'un bout à l'autre.<br />

Elle s'assit sur une pierre pour se reposer un peu et se recueillir. Elle avait besoin de<br />

toute sa prudence et de toute sa force pour l'oeuvre qui allait se consommer.<br />

Les chiens hurlaient d'une façon lugubre, comme s'ils avaient deviné l'infernale<br />

machination. Elle n'en avait point peur, car ils étaient enfermés dans la cour du château.<br />

– Me voici rendue saine et sauve, pensa-t-elle. Personne ne m'a vue! On dit qu'il y a un<br />

oeil qui voit tout, une oreille qui entend tout. Si Dieu me voit et m'entend, il ne m'empêche<br />

toujours pas d'accomplir mes desseins. Cette nuit encore je veux agir, et toutes les prières de<br />

la victime désignée ne serviront de rien. Si Dieu existe, il me laisse vivre et il laisse périr la<br />

dame de Beaumanoir!<br />

Il y avait, dans un coin de la tour, un escalier de pierre tournant qui montait jusqu'au<br />

toit et descendait jusqu'aux voûtes.<br />

Ces voûtes épaisses avaient servi de magasins autrefois, quand les habitants du<br />

château, à l'approche des Iroquois, venaient s'enfermer dans la tour.<br />

Après un moment de repos, la Corriveau, comme impatientée d'en avoir fini, passa<br />

sous une porte cintrée qu'elle avait observée dans l'ombre et se trouva sur un palier du grand<br />

escalier.<br />

– C'est par là, murmura-t-elle. De la lumière maintenant!<br />

Elle ferma la porte sur elle par mesure de prudence et alluma sa bougie.<br />

Comme on disait la tour hantée par des esprits, les servantes du château se donnaient<br />

garde d'y entrer. Les hommes même qui s'y aventuraient passaient pour des braves.<br />

La Corriveau, sa lumière à la main, descendit à pas lents au fond des voûtes<br />

ténébreuses. C'était une large caverne en pierre, véritable demeure de la nuit noire, dont<br />

l'obscurité humide semblait absorber la faible et vacillante lumière qu'elle portait. De rudes<br />

colonnes de pierres brutes séparaient en trois parties cette espèce de caverne.<br />

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