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A representação feminina nos lendários gaúcho e quebequense

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Ce bouge malpropre semblait faire partie du rocher auquel il s'adossait. C'était une<br />

petite construction, en pierre brute, surmontée d'un toit aigu, avec des auvents qui<br />

descendaient bas comme pour la cacher.<br />

Le seul être vivant qui l'habitait d'ordinaire était la mère Malheur, une vieille<br />

méchante, une vieille sans coeur, qui vendait du bon vent aux matelots et de la chance aux<br />

chasseurs. On la soupçonnait même d'exercer d'autres industries non moins condamnables. A<br />

force de pratiquer les superstitions, elle en était venue à croire un peu à ses propres<br />

impostures. Elle admirait la Corriveau, et la Corriveau, pour la récompenser de son amitié, lui<br />

avait révélé quelques-uns de ses diaboliques secrets, les moins importants, comme de raison.<br />

Mère Malheur la recevait toujours avec un plaisir sincère, la fêtait, la choyait, la<br />

servait de son mieux; jamais cependant elle ne se montrait trop curieuse. Elle ne l'interrogeait<br />

pas sur les motifs qui l'amenaient à la ville. Elle en devinait toujours assez long probablement.<br />

Au reste, ces deux femmes se connaissaient assez pour se comprendre sans de longs discours.<br />

Ce jour-là, la Corriveau se montrait plus réservée que jamais, et mère Malheur plus<br />

curieuse que de coutume. Elle avait parlé, mère Malheur, de toutes les drogues qu'elle avait<br />

vendues, de tous les horoscopes qu'elle avait tirés, des bonnes chances promises aux<br />

voyageurs, et des vents favorables garantis aux marins, et la Corriveau ne s'était vantée de<br />

rien; pas la moindre confidence en retour. Evidemment elle était sombre, la Corriveau; elle<br />

était songeuse, inquiète. Elle méditait quelque chose.<br />

– Si vous avez besoin de mes services, dame Dodier, lui dit-elle, enfin, ne vous gênez<br />

pas. Je crois que vous avez quelque tâche à accomplir. Quelquefois, petite aide fait grand<br />

bien. Je me mettrais dans le feu pour vous, dame Dodier! et pour n'importe quelle autre<br />

personne au monde je ne voudrais pas me brûler un doigt.<br />

– Je sais cela, mère Malheur, je sais cela! Vous avez raison, je médite quelque chose,<br />

et je vais avoir besoin de vous. Cependant, je ne puis vous dire pourquoi ni comment.<br />

– Est-ce d'un homme qu'il s'agit, ou d'une femme? Rien que cela, dame Dodier, je ne<br />

vous demande rien de plus.<br />

Elle regardait la Corriveau avec des yeux brillants de convoitise et de curiosité.<br />

– C'est d'une femme, répondit la Corriveau; ainsi vous allez m'aider. Vive notre sexe,<br />

toujours, mère Malheur, pour un forfait bien conditionné! Je ne vois pas trop à quoi<br />

serviraient les femmes si ce n'était à se tuer les unes les autres pour l'amour de ces vauriens<br />

d'hommes!<br />

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