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— Patriote, oui.<br />
— Voulez-vous rester avec moi ?<br />
— Je ne demande qu’à vous être utile.<br />
— Je ne vous demande pas cela, mais si vous voulez<br />
continuer votre administration. Restez-vous ou ne restez-vous<br />
pas ?<br />
— Je ferai ce que vous voudrez.<br />
Mal commencée, la visite s’acheva de la même façon.<br />
M. Pons accumula des maladresses, il n’arrivait pas à appeler<br />
l’Empereur sire, il lui donnait du monsieur, monsieur le comte,<br />
monsieur le duc, tout cela balbutié, et le malaise s’épaissit<br />
encore parce qu’il ne raccompagna pas le souverain, en bateau<br />
jusqu’à Porto Ferraio, ce que réclamait l’étiquette. Il était<br />
malheureux, M. Pons, et ce soir-là il songeait aux métiers qu’il<br />
pourrait exercer en Italie, chez l’un ou l’autre de ses acheteurs<br />
de minerai, lorsque Napoléon déciderait de l’expulser avec sa<br />
famille.<br />
Octave étrennait déjà un deuxième carnet, à la date du<br />
dimanche 22 mai : Je ne peux écrire que ce que je vois et<br />
montrer l’Empereur sans l’expliquer. Il est tout entier dans ce<br />
qu’il fait. Quand il ne fait pas la guerre il fait des routes avec<br />
une pareille énergie. Quelques jours lui ont suffi pour changer<br />
l’île en chantier. Quiconque sait creuser, maçonner, clouer,<br />
tailler, terrasser, peindre, coudre, planter est mis à<br />
contribution. Des étrangers arrivent désormais pour renforcer<br />
les ouvriers elbois, on parle de sculpteurs italiens qui vont<br />
ouvrir des ateliers et exploiter les mines de marbre à<br />
l’abandon. D’ailleurs, tout est à l’abandon. Tout est à bâtir ou à<br />
restaurer, comme les salines ou les madragues de la pêche au<br />
thon. Le corail ne sera plus réservé aux Napolitains, il y aura<br />
des droits d’entrée sur les blés. Les anciennes routes seront<br />
élargies et on en ouvrira de nouvelles. Déjà, des allées de<br />
jeunes mûriers entourent Porto Ferraio, dont les rues<br />
commencent à être pavées. Les magasins des salines serviront<br />
d’écuries, les forts aménagés, un hôpital prévu et la douane<br />
réorganisée. Sa Majesté ne veut plus se contenter de citernes<br />
mais amener en ville l’eau des montagnes. Il a repéré une<br />
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