11.07.2015 Views

La Chartreuse de Parme STENDHAL - livrefrance.com

La Chartreuse de Parme STENDHAL - livrefrance.com

La Chartreuse de Parme STENDHAL - livrefrance.com

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

avec <strong>de</strong>s diamants <strong>com</strong>me si elle allait à la cour. Le <strong>com</strong>te, ayant témoigné quelquecrainte <strong>de</strong> déranger les projets <strong>de</strong> Son Altesse, qui probablement allait sortir, l'Altesserépondit au ministre qu'une princesse <strong>de</strong> <strong>Parme</strong> se <strong>de</strong>vait à elle-même d'être toujoursainsi. Pour la première fois <strong>de</strong>puis son malheur le <strong>com</strong>te eut un mouvement <strong>de</strong> gaieté;j'ai bien fait <strong>de</strong> paraître ici, se dit-il, et dès aujourd'hui il faut faire ma déclaration. <strong>La</strong>princesse avait été ravie <strong>de</strong> voir arriver chez elle un homme aussi renommé par sonesprit et un premier ministre; la pauvre vieille fille n'était guère accoutumée à <strong>de</strong>semblables visites. Le <strong>com</strong>te <strong>com</strong>mença par une préface adroite, relative à l'immensedistance qui séparera toujours d'un simple gentilhomme les membres d'une famillerégnante.- Il faut faire une distinction, dit la princesse: la fille d'un roi <strong>de</strong> France, par exemple,n'a aucun espoir d'arriver jamais à la couronne; mais les choses ne vont point ainsidans la famille <strong>de</strong> <strong>Parme</strong>. C'est pourquoi nous autres Farnèse nous <strong>de</strong>vons toujoursconserver une certaine dignité dans notre extérieur; et moi, pauvre princesse telle quevous me voyez, je ne puis pas dire qu'il soit absolument impossible qu'un jour voussoyez mon premier ministre.Cette idée par son imprévu baroque donna au pauvre <strong>com</strong>te un second instant <strong>de</strong>gaieté parfaite.Au sortir <strong>de</strong> chez la princesse Isota, qui avait gran<strong>de</strong>ment rougi en recevant l'aveu <strong>de</strong>la passion du premier ministre, celui-ci rencontra un <strong>de</strong>s fourriers du palais: le princele faisait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r en toute hâte.- Je suis mala<strong>de</strong>, répondit le ministre, ravi <strong>de</strong> pouvoir faire une malhonnêteté à sonprince. Ah! ah! vous me poussez à bout, s'écria-t-il avec fureur, et puis vous voulezque je vous serve! mais sachez, mon prince, qu'avoir reçu le pouvoir <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>ncene suffit plus en ce siècle-ci, il faut beaucoup d'esprit et un grand caractère pourréussir à être <strong>de</strong>spote.Après avoir renvoyé le fourrier du palais fort scandalisé <strong>de</strong> la parfaite santé <strong>de</strong> cemala<strong>de</strong>, le <strong>com</strong>te trouva plaisant d'aller voir les <strong>de</strong>ux hommes <strong>de</strong> la cour qui avaient leplus d'influence sur le général Fabio Conti. Ce qui surtout faisait frémir le ministre etlui ôtait tout courage, c'est que le gouverneur <strong>de</strong> la cita<strong>de</strong>lle était accusé <strong>de</strong> s'êtredéfait jadis d'un capitaine, son ennemi personnel, au moyen <strong>de</strong> l'aquetta <strong>de</strong> Pérouse.Le <strong>com</strong>te savait que <strong>de</strong>puis huit jours la duchesse avait répandu <strong>de</strong>s sommes follespour se ménager <strong>de</strong>s intelligences à la cita<strong>de</strong>lle; mais, suivant lui, il y avait peud'espoir <strong>de</strong> succès, tous les yeux étaient encore trop ouverts. Nous ne raconteronspoint au lecteur toutes les tentatives <strong>de</strong> corruption essayées par cette femmemalheureuse: elle était au désespoir, et <strong>de</strong>s agents <strong>de</strong> toute sorte et parfaitementdévoués la secondaient. Mais il n'est peut-être qu'un seul genre d'affaires dont ons'acquitte parfaitement bien dans les petites cours <strong>de</strong>spotiques, c'est la gar<strong>de</strong> <strong>de</strong>sprisonniers politiques. L'or <strong>de</strong> la duchesse ne produisit d'autre effet que <strong>de</strong> fairerenvoyer <strong>de</strong> la cita<strong>de</strong>lle huit ou dix hommes <strong>de</strong> tout gra<strong>de</strong>.Chapitre XVIIIAinsi, avec un dévouement <strong>com</strong>plet pour le prisonnier, la duchesse et le premierministre n'avaient pu faire pour lui que bien peu <strong>de</strong> chose. Le prince était en colère, lacour ainsi que le public étaient piqués contre Fabrice et ravis <strong>de</strong> lui voir arrivermalheur; il avait été trop heureux. Malgré l'or jeté à pleines mains, la duchesse n'avait175

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!