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La Chartreuse de Parme STENDHAL - livrefrance.com

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Ferrante et du sort <strong>de</strong> ses enfants, pour lesquels il refusait obstinément tout ca<strong>de</strong>auayant une valeur, qu'elle lui permit <strong>de</strong> faire usage <strong>de</strong> cette cachette pendant assezlongtemps. Elle le revit un mois après, toujours dans les bois <strong>de</strong> Sacca, et <strong>com</strong>me cejour-là il était un peu plus calme, il lui récita un <strong>de</strong> ses sonnets qui lui sembla égal ousupérieur à tout ce qu'on a fait <strong>de</strong> plus beau en Italie <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux siècles. Ferranteobtint plusieurs entrevues; mais son amour s'exalta, <strong>de</strong>vint importun, et la duchesses'aperçut que cette passion suivait les lois <strong>de</strong> tous les amours que l'on met dans lapossibilité <strong>de</strong> concevoir une lueur d'espérance. Elle le renvoya dans ses bois, luidéfendit <strong>de</strong> lui adresser la parole: il obéit à l'instant et avec une douceur parfaite. Leschoses en étaient à ce point quand Fabrice fut arrêté. Trois jours après, à la tombée<strong>de</strong> la nuit, un capucin se présenta à la porte du palais Sanseverina; il avait, disait-il,un secret important à <strong>com</strong>muniquer à la maîtresse du logis. Elle était si malheureusequ'elle fit entrer: c'était Ferrante.- Il se passe ici une nouvelle iniquité dont le tribundu peuple doit prendre connaissance, lui dit cet homme fou d'amour. D'autre part,agissant <strong>com</strong>me simple particulier, ajouta-t-il, je ne puis donner à madame laduchesse Sanseverina que ma vie, et je la lui apporte.Ce dévouement si sincère <strong>de</strong> la part d'un voleur et d'un fou toucha vivement laduchesse. Elle parla longtemps à cet homme qui passait pour le plus grand poète dunord <strong>de</strong> l'Italie, et pleura beaucoup. Voilà un homme qui <strong>com</strong>prend mon coeur, sedisait-elle. Le len<strong>de</strong>main il reparut toujours à l'Ave Mana, déguisé en domestique etportant livrée.- Je n'ai point quitté <strong>Parme</strong>; j'ai entendu dire une horreur que ma bouche ne répéterapoint; mais me voici. Songez, madame, à ce que vous refusez! L'être que vous voyezn'est pas une poupée <strong>de</strong> cour, c'est un homme! Il était à genoux en prononçant cesparoles d'un air à leur donner <strong>de</strong> la valeur. Hier, je me suis dit, ajouta-t-il: Elle apleuré en ma présence; donc elle est un peu moins malheureuse!- Mais, monsieur, songez donc quels dangers vous environnent, on vous arrêtera danscette ville!- Le tribun vous dira: Madame, qu'est-ce que la vie quand le <strong>de</strong>voir parle? L'hommemalheureux, et qui a la douleur <strong>de</strong> ne plus sentir <strong>de</strong> passion pour la vertu <strong>de</strong>puis qu'ilest brûlé par l'amour, ajoutera: Madame la duchesse, Fabrice, un homme <strong>de</strong> coeur, vapérir peut-être; ne repoussez pas un autre homme <strong>de</strong> coeur qui s'offre à vous! Voiciun corps <strong>de</strong> fer et une âme qui ne craint au mon<strong>de</strong> que <strong>de</strong> vous déplaire.- Si vous me parlez encore <strong>de</strong> vos sentiments, je vous ferme ma porte à jamais.<strong>La</strong> duchesse eut bien l'idée, ce soir-là, d'annoncer à Ferrante qu'elle ferait une petitepension à ses enfants mais elle eut peur qu'il ne partît <strong>de</strong> là pour se tuer.À peine fut-il sorti que, remplie <strong>de</strong> pressentiments funestes, elle se dit: Moi aussi jepuis mourir, et plût à Dieu qu'il en fût ainsi, et bientôt! si je trouvais un homme digne<strong>de</strong> ce nom à qui re<strong>com</strong>man<strong>de</strong>r mon pauvre Fabrice.Une idée saisit la duchesse: elle prit un morceau <strong>de</strong> papier et reconnut, par un écritauquel elle mêla le peu <strong>de</strong> mots <strong>de</strong> droit qu'elle savait, qu'elle avait reçu du sieurFerrante Palla la somme <strong>de</strong> 25 000 francs, sous l'expresse condition <strong>de</strong> payer chaqueannée une rente viagère <strong>de</strong> 1 500 francs à la dame Sarasine et à ses cinq enfants. <strong>La</strong>duchesse ajouta: De plus je lègue une rente viagère <strong>de</strong> 300 francs à chacun <strong>de</strong> sescinq enfants, sous la condition que Ferrante Palla donnera <strong>de</strong>s soins <strong>com</strong>me mé<strong>de</strong>cin à213

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