odyssée - Notes du mont Royal

CHANT Xlll. 229
firent voile pour le pays de Sidon '; et moi, je restai là,
le. cœur affligé. » Il dit; et Minerve, la déesse aux yeux
étincelants, sourit : elle le toucha doucement de la main,
et, prenant la figure d'une femme belle, grande et savante
dans les beaux ouvrages, elle éleva la voix et lui
adressa ces paroles ailées : a II serait fin et subtil, celui
qui te surpasserait en ruses de toute sorte, fût-ce un dieu
qui luttât avec toi! mortel téméraire, artificieux, inépuisable
en feintes, tu ne devais donc pas, môme sur le sol
de ta patrie, renoncer aux tromperies et aux discours
fallacieux, qui te furent chers de tout temps ! Mais allons,
ne parlons plus de cela, puisque aussi bien nous nous
connaissons tous deux en ruses : car, si tu l'emportes de
beaucoup sur tous les mortels par la sagesse et par l'éloquence,
moi, je suis renommée entre tous les dieux pour
la prudence et l'astuce. Eh quoi! tu n'as pas reconnu
Pallas-Minerve, la fille de Jupiter, qui t'assiste toujours
et te protège dans tous tes travaux, et qui t'a rendu cher
à tous les Phéacieos. Maintenant encore je suis venue ici,
pour me concerter avec toi et cacher les richesses que
les illustres Phéaciens l'ont données, à ton départ pour
Ithaque, par mon conseil et mon inspiration. Je te dirai
tous les maux que tu es destiné à subir dans ta demeure
bien bâtie : il faut t'y résigner par nécessité, et ne découvrir
à personne, ni parmi les hommes, ni parmi les
femmes, que tu es arrivé en fugitif; mais souffre en silence
de nombreuses douleurs, et supporte les insolences
des prétendants. » L'ingénieux Ulysse, prenant la parole
à son tour, lui répondit : s II est difficile, déesse, au
mortel qui te rencontre, de te reconnaître, si habile qu'il
soit : car tu prends toutes les formes. Je sais bien que lu
fus bonne pour moi naguère, tant que nous autres, fils
1 C'est-à-dire ta côle de Phénicie, avec Sidon, sa capiia'e.
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