odyssée - Notes du mont Royal

CHANT V. 85
C'est moi qui le sauvai, comme il restait seul debout sur
la quille de son navire, que Jupiter avait frappé et fendu
par le milieu, sur la sombre mer. [Alors tous ces braves
compagnons périrent; mais lui, le vent et les vagues le
poussèrent sur ce rivage.] Je l'accueillis avec bonté, je le
nourris, et je lui promis de le rendre immortel et de
l'affranchir à jamais de la vieillesse. Mais, puisqu'il n'est
permis aux autres dieux d'enfreindre ni d'éluder les
ordres de Jupiter, qui porte l'égide, que ce héros cède à
l'impulsion ot à l'ordre du dieu, et qu'il s'en aille affronter
la mer inféconde. Toutefois, ce n'est pas moi qui le renverrai.
Car il n'a ni vaisseaux, pourvusse rameurs, ni
compagnons, pour le transporter sur le vaste dos de la
plaine liquide. Mais je lui donnerai des conseils bienveillants,
et ne lui cacherai rien, pour qu'il revienne sain et
sauf dans sa patrie. » Le meurtrier d'Argus, messager
des dieux, lui répondit à son tour : ce Renvoie-le à l'instant,
ainsi que tu le dis, et redouté la colère de Jupiter :
garde que dans son courroux il ne sévisse plus fard
contre toi. »
3. Après avoir ainsi parlé, le puissant meurtrier d'Argos
disparut. L'auguste Nymphe alla trouver lé magnanime
Ulysse, lorsqu'elle eut connnaissance des ordres de
Jupiter. Elle le trouva assis sur le rivage : ses yeux
étaient toujours humides de larmes : la douce existence
se consumait pour lui à soupirer après le retour, depuis
que la Nymphe ne lui plaisait plus. La nuit, il reposait,
contre son gré, dans la grotte profonde, auprès de Calypso
dont il ne partageait pas l'amour ; le jour, assis sur
les rochers du rivage [il se consumait dans les larmes,
les gémissements et le chagrin], les yeux attachés sur la
mer inféconde et baignés de pleurs. La noble déesse
s'approcha, et lui dit : « Infortuné, ne t'afflige plus ici, et
ne consume pas ainsi tes jours : je suis résolue désonnais
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