odyssée - Notes du mont Royal

CHAUT Ifl. ^ 873
chiens remuaient la quepe, et un bruit de pas arriva en
môme temps à son oreille. Aussitôt il adressa à Eumée
ces paroles ailées : f Eumée, voici venir sans doute un de
tes compagnons, ou quelque autre personne de connaissance
: car les chiens, au lieu d'aboyer, remuent la
queue; j'entends en outre un brait de pas. • H n'avait
pas fini de parler, que son cher fils parut dans le vestibule.
Eumée se leva, tout interdit, et les vases qu'il tenait
pour mélanger le vin, plein de feu, lui tombèrent des
mains; il courut à la rencontre de son maître, et couvrit
de baisers sa tête, ses beaux yeux et ses deux mains, en
versant d'abondantes larmes. Comme un père, plein de
tendresse, embrasse son fils qui revient d'une terre lointaine,
après dix ans d'absence, fils unique, qu'il a eu
dans sa vieillesse et pour lequel il a souffert bien des
tourments; de môme alors le divin porcher, enlaçant Télémaque,
semblable aux dieux, le couvrait de baisers,
comme s'il eût échappé à la mort; puis, il lui adressa en
sanglotant ces paroles ailées : # Te voiîà revenu, Télémaque,
douce lumière! non, je ne croyais pas te revoir,
du jour où tu t'es embarqué pour Pylos. Mais allons,
entre maintenant, cher enfant, pour que je rassasie mon
cœur à te contempler, toi qui, à peine arrivé, es venu
dans cette demeure : car tu ne visites pas souvent tes
champs et tes pasteurs; mais tu restes à la ville : c'est
qu'il te plaît sans doute en ton cœur de surveiller la
troupe pernicieuse des prétendants. » Le sage Tèlémaque
lui répondit à son tour : s 11 en sera comme tu voudras,
mon père. C'est pour toi que je suis venu ici : j'ai voulu
te voir de mes yeux et apprendre de ta bouche si ma
mère habite encore dans le palais, ou si elle a déjà pris
quelque autre époux : peut-être la couche d'Ulysse, laissée
à l'abandon, est-elle la proie de l'araignée hideuse. »
Le porcher, chef des pasteurs, lui répondit à son tour :