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Algérie, les oubliés du 19 mars 1962

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Dans L’Humanité du 5 juin, François Billoux, député communiste des

Bouches-du-Rhône, recommande au gouvernement de loger les rapatriés

« dans les châteaux de l’OAS » : « Ne laissons pas les repliés d’Algérie

devenir une réserve du fascisme. »

Sur les harkis déferlent les monstruosités de l’apocalypse. Les

nouveaux maîtres de l’Algérie foulent rapidement les nébuleuses

promesses de pardon qu’ils leur avaient dispensées. Ils se vengent. Tenus

par la France de rendre leurs armes, privés de protection, sans défense,

les « traîtres » sont livrés, par unités entières, par villages entiers, par

familles entières, à leurs bourreaux, qui leur crèvent les yeux, leurs

coupent les nez, les oreilles, les lèvres, leur arrachent la langue, les

plongent dans des chaudrons d’eau bouillante, les empalent, les

embrochent, les émasculent, les égorgent, les dépècent à la tenaille, salent

leurs plaies, les lapident, les brûlent vifs, les enterrent vivants… Des

250 hommes du commando Georges qui, le 27 août 1959, avaient défilé

fièrement, à Saïda, devant le général de Gaulle, une poignée seulement

va échapper à la mort.

Né en Kabylie, Mohand Hamoumou, fils de harki, témoignera :

*

« La plupart furent humiliés et torturés publiquement,

longuement, avec un luxe de raffinement dans l’horreur. La mort

était une délivrance, d’où la recherche de morts lentes pour faire

durer l’expiation. Le supplice est destiné à rendre infâme celui qui

en est la victime et à attester le triomphe de celui qui l’impose. Plus

le doute est permis sur l’infamie de l’accusé, plus le supplice doit

être démesuré pour persuader l’assistance de la culpabilité de la

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victime . »

« Un massacre honteux pour la France, comme pour l’Algérie », dira

Jean Lacouture dans Télérama du 13 septembre 1991. Dominique

Schnapper, dans Le Monde du 4 novembre 1999 : « La France s’est mal

conduite. Elle n’a pas respecté sa parole pour des raisons politiques. Elle

a abandonné à la vengeance de ses ennemis ceux qui étaient engagés

pour elle. » Et Simone Veil, le 18 mars 2010, lors de sa réception à

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