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En métropole, la presse va minimiser l’ampleur de la tragédie. Elle
minaude. Dans son édition datée du 10 juillet, Le Monde, si prompt à
stigmatiser les méfaits de la colonisation et les exactions de l’armée
française, se distinguera par sa prudence. Un modèle de désinformation :
« Les Oranais se racontent de bouche à oreille des scènes d’enlèvements,
de tortures, de pillages. Ces récits sont difficilement contrôlables. » Sousentendu,
les rastaquouères ont la réputation d’avoir le sang chaud, ils
exagèrent certainement… Le 8 juillet, le quotidien de référence du soir
avait, du haut de sa respectabilité, chiffré à 25 le nombre d’Européens
tués ou enlevés…
Depuis les accords d’Évian, les enlèvements constituent l’un des
instruments de la stratégie « de terreur permanente et de peur
permanente » prônée par Radio Damas.
Le 5 juillet, dans l’après-midi, Joseph Pinto, cinquante-huit ans,
représentant de commerce, sort de chez lui, 10 rue Léon-Djian. Curieux,
il veut voir ce qui se passe dehors. Dans l’appartement, sa famille va
guetter son retour. Impatiente. Pas de bruit de pas dans l’escalier. La
porte qui ne s’ouvre pas… L’angoisse va s’insinuer. Joseph Pinto ne
reviendra pas.
Également disparus le 5 juillet, Eugène Benoît, cinquante-huit ans,
er
adjoint forestier, kidnappé à son domicile, 37 avenue Albert-I ; Alfred
Aranda, trente-sept ans, enlevé avenue d’Oujda, à proximité du cinéma
Rex ; Gérard Chérubino, dix-huit ans, employé de banque ; Francis
Segado, trente-deux ans, chauffeur d’autobus ; Henri Muller, trente-deux
ans, entrepreneur de transports ; Christian Mesmacque, dix-huit ans,
enlevé avec des amis, André Chiappone, Julien Bagout, sa sœur, Jeanne
Bagout-Ricard, et ses quatre enfants, Alain, Christiane, Edith et
Salvadore. Ils étaient partis à la plage ; Ernest Martinez, vingt-deux ans,
menuisier ; Henri Jover, vingt-trois ans, employé des Ponts et chaussées ;
Cyr Jacquemain, vingt-sept ans, magasinier sur la base aérienne 141, et
son oncle, Joseph Garcia, cinquante-sept ans ; ils se rendaient à La Sénia
à bord d’une Peugeot 403 noire, immatriculée 822 EA 9G ; Marcel Facet,
quarante-neuf ans, et son frère Lucien, cinquante-sept ans, agriculteurs à
Saint-André-de-Mascara ; ils circulaient dans une voiture
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