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avaient remplacés, perpétuant le rêve fou de bâtir un monde plus vivable
et plus juste, auquel ils allaient lentement donner forme.
Mondovi, village natal d’Albert Camus, était un autre de ces centres de
colonisation fondés en 1848. Née quant à elle dans une famille
bourgeoise d’Alger, Marie Cardinal rendra hommage à ces « premiers
colons » qui « s’étaient donné du mal » pour rendre la terre
« cultivable » : « Ils avaient asséché les marécages qui grouillaient de
vipères et de moustiques à paludisme. Ils avaient drainé l’eau salée qui
imbibait les plaines côtières. Ils avaient ensuite dessalé ces plaines pour
les rendre fertiles. Ils s’étaient crevés à la peine sous le soleil. Les fièvres
et la fatigue les avaient fait mourir comme meurent les pionniers de
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légende, dans la maison qu’ils avaient construite de leurs mains … »
En 1862, les surfaces cultivées autour d’Assi Ben Okba avaient
augmenté de moitié et, en 1878, le village comptait 72 maisons et
320 habitants.
Le premier Bonhomme à y avoir posé ses valises est l’arrière-grandpère
de Roger. « Paysan de Gaillac, dans le Tarn, il était un peu
révolutionnaire et certainement très pauvre. » La mère de Roger, Adeline
Lambreghts, avait des origines belges et italiennes. « Ses aïeux, non plus,
ne roulaient pas sur l’or. » Les uns et les autres avaient cru aux promesses
nord-africaines. « Une maladie grave, ainsi parlait les médecins de
l’époque », emporta Adeline Lambreghts en 1947. Elle avait trente ans.
Ses deux fils, Roger, né le 25 avril 1932, et Paul, né le 17 mai 1935,
n’avaient plus que leur père, lui aussi souffrant d’une « maladie grave ».
L’aîné, Roger, dut nourrir la famille et, bien qu’élève studieux,
abandonner les salles de classe du collège Ardaillon, à Oran pour les six
hectares de vigne et les sept hectares de céréales dont son père, trop
faible, ne pouvait plus s’occuper. « Nous étions un peu largués. Certes,
mon père avait dix frères et sœurs. Mais chacun devait affronter ses
propres problèmes qui l’empêchaient de se charger des nôtres. »
Paul a vingt ans et travaille dans une menuiserie quand un de ses
copains lui annonce fièrement qu’il s’enrôle dans les chasseurs alpins
« pour faire du ski ». Pourquoi Paul ne le suivrait-il pas ? Il accepte. Le
15 juin 1955, il signe un « engagement volontaire provisoire » de deux
ans. Le 28, il débarque à Marseille et, le 12 août, il franchit, près
e
d’Annecy, le portail du 27 BCA, qui a pour double devise « Vivre libre