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Algérie, les oubliés du 19 mars 1962

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la guerre de 14-18 et est mort des suites de ses blessures. Je ne l’ai pas

connu. » Le 22 avril 1944, Paul Teuma et Suzanne-Élisabeth Vigne

auront une fille, Marie-Claude. « Mon père travaillait à la TWA. Nous

habitions 9, rue Édouard-Cat, au douzième étage d’un immeuble

dominant le tunnel de Telemly. Nos fenêtres donnaient sur la baie

d’Alger. Une vue magnifique. À l’école maternelle, près de la rue

Hoche, mes petites copines étaient européennes ou arabes. On jouait

ensemble sans tenir compte de nos différences. »

Enfant unique, comme ses parents, Marie-Claude a sept ans quand la

famille déménage pour Oran, où Paul Teuma prend la tête des

établissements Montserrat, « vins et boissons gazeuses », qui

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embouteillent et distribuent, en particulier, les canettes d’Orangina . Les

Teuma bénéficient d’un logement de fonction situé au-dessus de l’usine,

18, boulevard Froment-Coste. Le grand-père paternel de Marie-Claude,

François Teuma, dirige l’hôtel Quantin, 3, rue Ampère, « derrière la place

de la Bastille, près du Martinez », un quatre-étoiles, dont le patron sera

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abattu le 5 juillet 1962 . Jeune immigré espagnol, Fernand Martinez avait

enchaîné, dans les années 1930, les emplois de garçon de café, avant de

se mettre à son compte et, réussissant dans les affaires, de se hisser au

rang de notable.

La série d’attentats de la Toussaint Rouge, en 1954, l’assassinat d’un

jeune instituteur, Guy Monnerot, et du caïd du douar m’chounèche, Hadj

Sadok, sur l’étroite RN31 entre Biskra et Arris, au petit matin du

er

1 novembre, pas plus que les émeutes du Constantinois, à la fin août de

l’année suivante, ne troublent la gaieté de la petite écolière de Jules-

Renard. L’école porte le nom de l’auteur d’un « ouvrage illustré de 40

gravures », Les étapes d’un petit Algérien dans la province d’Oran,

publié en 1888, « sous le patronage du conseil général et de la société de

géographie d’Oran ».

Une gamine qui grandit sereinement, en marge du monde des adultes.

Les débats du 12 novembre 1954 à l’Assemblée nationale ne distraient

pas Marie-Claude de ses jeux. Elle n’en mesure pas la gravité. Le

président du Conseil, Pierre Mendès France, qui s’exclame :

« Qu’on n’attende de nous aucun ménagement à l’égard de la

sédition, aucun compromis avec elle. On ne transige pas lorsqu’il

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