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français. » Bien que fils de pieds-noirs, il était né en Espagne, dans le
e
village d’où venait sa famille. Une coutume : au XIX siècle et au début du
e
XX , afin de maintenir les liens avec le pays des ancêtres, les femmes y
étaient envoyées accoucher de leur premier bébé.
José qualifie son enfance à la ferme d’Oued Sebbah, où son père
produisait du raisin, des olives et des agrumes, de « plus belle période de
[sa] vie ». « Pas d’école. La liberté totale. Je jouais dehors toute la
journée. Comme nous étions les seuls Européens du secteur, je n’avais
pour copains que des petits Arabes, enfants des ouvriers de la ferme ou
du douar voisin où vivaient plusieurs centaines d’habitants. Jusqu’à ce
que j’aille à l’école d’Aïn el Arba. Le nom de ce village signifie “la
quatrième source” en arabe. »
1954. La Toussaint Rouge ne perturbe pas la tranquillité laborieuse
d’Oued Sebbah. José a douze ans. « Dans notre coin reculé, loin de
l’agitation des villes, on se sentait en sécurité. Mon père travaillant dans
les champs, il laissait ma mère seule à la ferme avec ses enfants. Nous
n’envisagions pas que notre monde se désagrégerait. »
Les problèmes commencent à se poser l’année suivante, après les
émeutes qui, en août, sèment la terreur dans le Constantinois. « La
situation s’est dégradée de mois en mois. » Craignant d’être agressé dans
l’obscurité, Joseph Belda, le soir, avant d’aller se coucher, ne sort plus
dans la cour pour éteindre le générateur d’électricité. Chaque jour, il
l’alimente d’une quantité limitée de fuel, afin que, le carburant épuisé, le
moteur s’arrête tout seul vers 23 heures. Aucun signe d’accalmie. De plus
en plus souvent, les journaux relatent des attaques de fermes. Bâtiments
incendiés, occupants massacrés. Juste avant l’été 1956, les Belda
déménagent pour la maison du grand-père, sur la place d’Aïn el Arba.
« Mon père prenait le chemin de la ferme au petit matin et rentrait le
soir. »
L’emballement du rythme des départs de pieds-noirs marque l’année
1962. Surtout après les accords d’Évian, qui prévoient pourtant :
« Leurs droits de propriété seront respectés. Aucune mesure de
dépossession ne sera prise à leur encontre sans l’octroi d’une
indemnité équitable préalablement fixée. Ils recevront les garanties
appropriées à leurs particularismes culturel, linguistique et