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Hans Jonas à considérer l’image de la vie étrangère comme un
symbole primordial du gnosticisme et le Dieu gnostique comme
„l’Étranger absolu”, en ce sens qu’il serait transcendent, au-delà et
extérieur au monde. L’opposé corrélatif de cet „au-delà” c’est
„l’ici-bas”, qui est une réalité plurielle, labyrinthique, formée de
monades, éons, signes zodiacaux, de tout un réseau démoniaque,
une terre de l’exil pour l’âme aliénée de son origine divine et qui
exprime autant de séparations de cette même origine. Le
symbolisme du mélange entre l’Obscurité et la Lumière, entre la
Matière et l’Esprit, associé avec celui de la chute et du rejet de
l’esprit de la Lumière dans la Matière et dans l’Obscurité, explique
la condition du monde et de l’homme. Les antithèses : Lumière//
Obscurité, Matière// Esprit occupent un lieu commun dans la
littérature gnostique, même si c’est le manichéisme qui amène sa
consécration définitive. Victime de cette dualité, l’homme
gnostique se perçoit soi-même comme un rejeté, comme un exilé
en ce monde, ce qui, selon Jonas, dessine une vision de l’existence
similaire à celle de la philosophie existentialiste moderne: „voilà
un des symboles fondamentaux du gnosticisme: la chute précosmique
d’une partie du principe divin est la raison profonde de
la genèse du monde et de l’existence humaine”. 24 Dans la majorité
des systèmes gnostiques, la Lumière tombée dans les Ténèbres
exprime une phase du drame divin, dont on peut affirmer qu’elle
est une étape ultérieure, figurée par ces mots des Écritures: Et la
lumière brilla dans les ténèbres. D’où provient cette chute? Quels
en sont les moments? – ce sont autant de sujets qui montrent que
cette condition de l’homme jeté au monde ne se définit pas
uniquement comme un épisode lointain, qui a eu lieu dans la
préhistoire de l’humanité, mais qu’il s’agit de la condition
existentielle actuelle de l’homme. 25 Les catégories affectives qui
accompagnent cette condition de l’homme gnostique reflètent,
d’une part, des expériences généralement humaines, telles :
l’effroi, le désespoir, l’abandon, la nostalgie. Il y en a d’autres qui
sont exclusivement gnostiques, telles: la torpeur, le sommeil,
l’oubli, qui caractérisent la condition de l’homme avant son réveil
de l’état d’ignorance, avant de recevoir la gnose, qui cause un
24 HANS JONAS, Op. cit., p. 74.
25 STELIAN MANOLACHE, Op. cit., p. 34.
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